Essai: YAMAHA XTO 425

Force 8 !

Huit comme huit cylindres. Avec ses 425 chevaux, le tout nouveau V8 de chez Yam’ n’est pas seulement le plus puissant hors-bord parmi ceux des fournisseurs « historiques », il est aussi celui qui possède la plus forte cylindrée. Accessoirement, il est aussi le premier quatre-temps à injection directe. Nous avons pu le tester sur deux semi-rigides XXL. Des bateaux à sa (dé)mesure…

Texte Philippe Leblond – Photos Philippe Leblond et


 56060 €

Essai paru le 07/11/2018



Intimidant. C’est l’impression première lorsqu’on découvre le « bestiau », surtout lorsqu’il figure en brochette de quatre sur le tableau arrière du Tempest 50 pieds ! Avec son faciès biomécanique, vaguement hérité du monstre Alien, et sa corpulence hors du commun, le XTO laisse entrevoir un tempérament volcanique. De fait, si l’on excepte les trois golgoths de « l’artisan » américain Seven Marine (qui appartient aujourd’hui à Volvo Penta), trois V8 à compresseur de 527, 577 et 627 chevaux issus du même V8 General Motors de 6,2 litres, le nouveau Yamaha possède la plus grosse cylindrée des moteurs « industriels », à savoir 5,6 litres. Pas « d’assistance respiratoire » pour le V8 atmosphérique japonais, mais un perfectionnement technique majeur : l’injection directe, une première sur un hors-bord quatre-temps. Pour en terminer avec les hors-bord de fortes puissances, un petit rappel des cubes les plus gros chez les concurrents de Yamaha : le Verado 400 ch à compresseur de Mercury, le 350 ch à double hélice de Suzuki, le 300 ch deux-temps d’Evinrude et le 250 ch VTEC de Honda (que l’on trouve aussi chez Tohatsu). Pour sa part, Selva se contente d’un 250 ch, issu du Yamaha de même puissance. Voyons de plus près ce que nous réserve sa majesté XTO, tant sur le plan technique qu’accélérateur en main…

Un taux de compression record

Conscient de l’impératif de juguler la consommation d’un moteur d’une telle cylindrée, Yamaha devient le premier motoriste à appliquer l’injection directe sur un hors-bord quatre-temps. Cette injection directe haute pression (Yam’ l’avait déjà greffée sur sa gamme deux-temps « HPDI »), qui se fait directement dans la chambre de combustion des cylindres via cinq pompes réglées à 200 bars, améliore l’atomisation du carburant pour une meilleure combustion et une diminution des gaz imbrûlés. Par ailleurs, le refroidissement est assuré par un système de pompe à eau à deux-temps avec deux turbines largement dimensionnées, l’une en caoutchouc, l’autre en acier ultra-robuste. La résistance à l’échauffement et la fiabilité de ce big block réside également dans l’adoption de chemises de cylindres issus de la technologie de fusion au plasma qui présente de surcroît l’atout de la légèreté et de la compacité, au service d’une moindre friction et donc d’une économie de carburant. Côté distribution, ce bloc high-tech possède bien sûr deux arbres à cames en tête entraînés par chaîne à tension automatique plongée dans un bain d’huile, et des poussoirs de soupapes revêtus de carbone, pour une fiabilité et un silence de fonctionnement accrus. Yamaha revendique le taux de compression le plus élevé de la planète hors-bord avec un ratio de 12,2 : 1, l’objectif étant d’obtenir une réactivité maximale à l’accélération et un surcroît de puissance dès les premiers tours moteur.

L’un des gros avantages du nouveau XTO est de posséder un rapport d’embase long qui, grâce à son couple « camionesque », favorise la vitesse sans altérer l’accélération, grâce au montage d’hélices possédant à la fois un pas long et un gros diamètre, même sur des bateaux à fort déplacement, à l’image de celles retenues pour ces essais (16’’1/4 de diamètre pour 23’’ de pas). Autre point positif, Yamaha a fait en sorte d’améliorer la motricité de son V8 en marche arrière. A cette fin, en dessous de 2 500 tr/min, les gaz d’échappement ne sortent plus par le moyeu de l’hélice, mais par les flancs de l’embase, de sorte que les pales brassent une eau plus dense lors des manœuvres au port, comme lors des parties de pêche. Sans oublier la direction assistée électrique, entièrement intégrée, supprimant câble et biellette hydraulique, et offrant un toucher d’une douceur, d’une réactivité et d’une précision très agréables pour le barreur.

D’un point de vie plus pratique, Yamaha a augmenté l’angle de relevage du moteur, en comparaison de celui du V8 350, permettant de sortir totalement l’embase de l’eau au mouillage. Un bon point pour limiter le tirant d’eau, voire pour l’échouage, et éviter l’accrochage d’algues et de coquillages. Le XTO c’est aussi de nombreuses fonctions de pilotage et de contrôle, via le Helmmaster à écran de sept pouces (CL7) et le joystick de manœuvre intuitif et autorisant rotation sur place et déplacements latéraux pour des prises de quai facilitées.

Des 40 et 50 pieds à plus de 50 nœuds !

Pesé lors du grutage par le staff technique de Yamaha Motor France, le Tempest 50 accuse 13 tonnes, pas moins, sur la bascule ! En ordre de marche bien sûr (pleins de carburant et d’eau) et lesté des quatre XTO. Puissance totale : 1 700 chevaux ! Pas courant sur un semi-rigide… Oui, mais là, il s’agit du nouveau modèle-amiral de Capelli, avec ses presque 15 mètres (14,80 m) et ses deux cabines. Avec 3 250 kg chacun à pousser, les nouveaux V8 ont du boulot ! Qu’à cela ne tienne, il suffit de 4’’9 seulement à cet ensemble XXL pour s’arracher à la Grande Bleue et planer, reprise d’assiette comprise. Un dixième de plus et le Capelli passe la marque des 20 nœuds ! La démonstration de force est impressionnante. Les quatre V8 surpuissants pulvérisent des tonnes d’eau salée quelques mètres au-delà du tableau arrière, dans un grondement feutré. Malgré le gabarit du bateau, la sensation d’accélération est immédiate. Les aiguilles des compte-tours poursuivent leur ascension sans faiblir ou presque. Les cristaux liquides du GPS sont pris de frénésie, jusqu’à afficher 53,5 nœuds, soit le seuil des 100 kilomètres/heure. Pas mal pour un semi-rigide de père de famille ! Des performances qui vont encore grimper d’un cran avec notre second bateau d’essai, le superbe Lomac Gran Turismo 14.0 (13,65 m). Moins lourd, le plus grand des Lomac, inédit comme le Capelli, exhibe « seulement » trois XTO, soit la bagatelle de 1 275 chevaux. Une misère… Toujours est-il que lesté de 750 litres de carburant et 100 litres d’eau, le Lomac franchit sa bosse de déjaugeage en seulement 4’’5 et passe de 0 à 20 nœuds en 5’’2. Pour ce qui de la V-max, notre GPS rend son verdict : 56,4 nœuds. La barre symbolique des 100 km/h est tombée. Alors, évidemment, vient la question de la consommation… Un coup d’œil à nos relevés donne le vertige, et c’est normal avec tant de puissance. Au régime maxi, 547 l/h pour le Tempest quadrimoteur, 418 l/h pour le Gran Turismo trimoteur… Ça calme ! Mieux vaut considérer les meilleurs rendements : 0,16 mille par litre pour le Capelli à 3 500 tr/min et 27,5 nœuds, soit 172,9 l/h, 0,24 m/l pour le Lomac à 3 000 tr/min et 25,5 nœuds, soit 105,5 l/h. En consommation unitaire (un seul moteur) cela donne respectivement 43 l/h et 35 l/h. On se sent un peu mieux, non ? Des chiffres qui, vus sous cet angle, sont vraiment satisfaisants pour un V8 de cette magnitude.

Concerto en V8 majeurs

Au plan du pilotage, les sensations sont bien au rendez-vous. Il y a la poussée, bien sûr, qui colle pilote et passagers au dossier de leur siège, la relative discrétion sonore aux allures de croisière, grâce à des notes graves mais onctueuses, V8 oblige, mais il y a aussi cette sorte de rage qui accompagne les hauts régimes, qu’on ne connaît pas au F350, le « vieux » V8 de Yamaha. Et de cette énergie émane une sonorité sportive, un chant choral qui monte de deux octaves. Les mélomanes apprécieront. Bref, assurément, le nouveau XTO nous a fait forte impression. Pour l’instant, il est commercialisé exclusivement en package et au minimum en bimoteur, accompagné d’une garantie de cinq ans. Servi par un design qui capte le regard, ce 425 ch est disponible en deux coloris : le fameux gris bleuté Yamaha ou un blanc perle.

Avec l’apparition d’une telle mécanique, le champ des possibles de la motorisation hors-bord s’élargit à des bateaux de plus en plus grands, à l’image des semi-rigides de 40 et 50 pieds (!) qui ont servi de support à l’essai du XTO, mais également à des coques open ou cabin-cruisers de dimensions comparables. Force est de constater que les chantiers jouent le jeu, offrant une architecture compatible, avec pour conséquence le déclin, déjà amorcé, du moteur in-board essence.



photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425


photo YAMAHA XTO 425





Mesure_dyn_capelli
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