Essai Nuova Jolly Prince 35 CC

Duel au sommet

Si l'on excepte le monumental Prince 43 (13 m), ces deux 35 pieds de la même gamme sont les plus grands modèles du constructeur italien. Coques différentes et plan de pont aussi, avec un 35 CC semi-rigide de week-end et un 35 SC, véritable unité de croisière. Le premier joue la carte de la sportivité, le second misant davantage sur le confort. Match fratricide.

Texte Philippe Leblond – Photos Jérôme Kalagopian pour French Boat Market et Philippe Leblond


 128 791 € sans moteur (tarif 2016)
 9.92 m
 16
 53.5 nds avec 2 x Yamaha 350 ch 4T
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Paru dans le Pneumag n° 103 Septembre/Octobre 2014



Il y a tout juste trois ans, le 35 Sport Cabin s'était glissé avec autorité dans le costume de "vaisseau-amiral" du chantier milanais. Une année plus tard, c'était au gigantesque 43 Luxury Cabin de lui ravir la prestigieuse tunique, mais pour "boxer" dans la catégorie supérieure. Et voilà que fin 2013 (première mondiale au Nautic de Paris), le 35 Center Console, sculpté dans son "training" aux contrastes agressifs, vient carrément marcher sur les plates-bandes de son frère aîné, celles que convoitent les semi-rigides de moins de 10 mètres, à la limite de la taxation italienne.

Toutefois, grâce à sa clairvoyance et son savoir-faire, le chantier italien a su éviter le "choc frontal" entre ses deux 35 pieds. Les deux bateaux sont vraiment différents. Si le 35 SC est arrivé sur le marché avec une identité croisière bien affirmée (vraie cabine avec salle d'eau + seconde cabine optionnelle), le 35 CC se positionne parmi les "weekender" (pour passer une ou deux nuits à bord), ajoutant à son plan de pont de bateau de jour, une petite cabine à même de prolonger les escales. Mais cette différence entre les deux Prince va plus loin que l'organisation de leur pont, comme tient à le souligner Teo Aiello, directeur marketing de Nuova Jolly : "Leur carène aussi est différente. Celle du 35 CC est plus fine et plus tulipée à la proue. Elle est aussi légèrement plus courte. En un mot, nous l'avons voulue plus sportive." Et cette identité plus dynamique, renforcée par un look accrocheur, a semble-t-il fait mouche lors du grand rendez-vous parisien, Teo Aiello évoquant un carnet de commandes bien rempli…
Pour établir ce comparatif de manière plus équitable, nous avons repris les mesures de performances que nous avions relevées deux ans plus tôt, au même endroit, sur un 35 SC propulsé par deux Yamaha 350 ch, la puissance qui équipe ici le 35 CC, tandis que le 35 SC qui lui est opposé a du se contenter de deux Yamaha de 300 ch. Nous vous livrerons quand même, à titre informatif, les chiffres obtenus avec cette motorisation. Mais, laissons la parole aux deux acteurs, dont la qualité de construction et de finition n'est plus à vanter…

Le Nuova Jolly Prince 35 CC :
Franchement, avec son opposition de couleurs noire (brillante pour le gel-coat, mate pour les flotteurs) et orange vif (sellerie, bande de ragage), le 35 Center Console a de la gueule !
Sa silhouette est aussi nettement plus gracieuse que celle du Prince 34 qu'il va remplacer. Même si sa proue très défendue rappelle celle de son aîné, c'est surtout le dessin dynamique des superstructures qui fait la différence. Le pont en teck massif et les deux V8 Yamaha, les plus gros hors-bord de série, achèvent de planter le décor… Celui d'un semi-rigide de grand tourisme, fait pour les grands espaces, avec cette carène dont le V oscille de 35° à l'étrave à 25° au tableau arrière, peu ou prou les valeurs d'un offshore classique, type Cigarette. En tout cas, la garantie – en mettant la puissance qu'il faut – d'obtenir un pilotage vivant et des performances de haut vol. Nous verrons plus loin que l'objectif est atteint.
Profitons d'abord de notre tour du propriétaire pour apprécier la surface de pont impressionnante offerte par le 35 SC et l'aisance à se déplacer de la proue à la poupe : passage latéral arrière, larges passavants, mains courantes le long du poste de pilotage, delphinière en escalier pour faciliter le débarquement ou l'embarquement par l'avant… Un petit reproche, toutefois, pour la plate-forme de bain un peu exiguë et à l'échelle non intégrée (c'est moins esthétique).
Notre découverte se poursuit avec l'ouverture frontale de la console. Cette grande porte, assistée par vérin, dévoile une petite cabine ayant tout de même le mérite de proposer deux couchettes séparées par un coffre dissimulant un WC. Un élément central permet de les relier en un lit double. Impossible, à cet instant, de ne pas penser au Lomac Adrenalina 9.5. Même si le Prince 35 est un demi-mètre plus long, sa conception est très voisine et le met en concurrence directe avec le Lomac, apparu deux ans auparavant. Hormis un carré des plus conviviaux (sept personnes peuvent prendre place autour de la table !) et une cabine prête à accueillir un couple le temps d'un week-end, le chantier n'a pas oublié nombre d'options visant à accroître encore le luxe de ce sprinteur domestiqué : bimini sur roll-bar, mât de ski, évier et plaque de cuisson (montés dans le leaning-post), taud de console, extension de solarium arrière, propulseur d'étrave… Ces options viennent s'ajouter à une dotation standard pourtant généreuse : guindeau électrique, frigo, WC, dînette de poupe, plancher en teck, gonfleur électrique, douche de pont… Et question rangement, les coffres se montrent volumineux, notamment pour les objets longs qui y trouveront aisément leur place.
Séduisant à quai, le Prince 35 CC devrait aussi l'être en mer. En tout cas, c'est le sentiment qu'on éprouve lorsqu'on observe cette carène aux lignes sportives et qu'on additionne la puissance de ses deux gros hors-bord (700 ch !). Une fois à l'écart de la jetée du port de la Rague, je ne résiste pas à pousser franchement les deux accélérateurs électroniques. La douceur du maniement tranche avec l'énergie déployée dans notre dos. Les hélices mordent instantanément dans la Grande Bleue et catapultent les plus de quatre tonnes du Prince 35 CC vers le large, tandis que le chrono fige la performance : 5"5 pour franchir les 20 nœuds ! La poussée des V8 se poursuit, déclinant à peine, pour affoler les cristaux liquides de notre GPS. Verdict : le dernier-né des Nuova Jolly franchit allègrement la barre des 50 nœuds : 53,5 nœuds !
Bien sûr, avec une telle pointe de vitesse, les allures de croisière sont à la fête. Avec 29 nœuds à 3 500 tr/min et 37 nœuds à 4 500 tr/min, les distances raccourcissent comme par enchantement. Avec un tiers de litre d'essence consommé par mille, les rendements sont encore acceptables, mais au-dessus de 5 000 tr/min, la soif des gros Yam devient préoccupante (257 litres par heure !)… Un restant de houle (un mètre), de secteur sud-est nous permet de constater l'aisance de cette carène qui ne demande qu'à s'aérer sous la poussée des moteurs. L'impression de souplesse dans la vague et la réactivité aux gaz sont grisantes, et le pilote ne se lasse pas d'optimiser les réglages gaz/trim à chaque changement d'allure. Le confort à bord reste encore acceptable alors que, d'une crête à l'autre, les hélices flirtent avec l'air, à l'approche du régime maxi. Bien équilibré, sain, docile, ce Prince réalise aussi un sans faute en virage rapide et serré, sans décrochage et sans pompage, comme c'est parfois le cas sur les longs semi-rigides (même avec un trim rentré).



photo Nuova Jolly Prince 35 CC


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