Essai Alugator 680

Vision décalée

L'Alugator se démarque de nos références en matière de semi-rigides. C'est ce que voulait résolument son constructeur, et de ce point de vue, c'est réussi. Passé le choc visuel, on apprécie aussi le plan de pont bien balancé, et le confort en navigation. Reste un "toucher de mer" très particulier, qui peut dérouter les inconditionnels de la carène classique.

Texte et photos Philippe Leblond


 44 970 € (tarif 2008)
 6.8 m
 12
 38 nds avec Mercury 200 ch Verado 4T
Banniere_axa

3_bannie_re-he_lice-540x145
Orca-logo_rvb

Paru dans le Pneumag n° 67 septembre/octobre 2008




"Je voulais vraiment faire quelque chose de différent"… Ces mots sont de Yannick Littoux, constructeur de l'Alugator, qui n'a pas hésité à mettre son "bébé" entre nos mains, sitôt ce dernier sorti de l'atelier (voir la construction de l'Alugator dans les pages qui précèdent). De fait, on ne voit que deux semi-rigides de série se rapprochant de cette architecture héritée des formes de carène des voiliers modernes : l'Ufo 6.9 Carbon (voir Pneu Mag 60) de Xavier Pillet, et le VSR 5.8 Coach (voir Pneu Mag 54), petit semi-rigide utilitaire construit en Slovénie. Ainsi, la carène de l'Alugator possède elle aussi une forme en coin, mais s'élargissant moins que celle de l'UFO à l'arrière. "Je voulais un bateau au gabarit routier, flotteurs gonflés", justifie Yannick Littoux. Ce dernier a donc fait appel à l'architecte naval, Tanguy Lebihan, qui a donné à l'Alugator cette carène peu commune dite de "wave-piercer" (perceuse de vague). Le V déjà marqué à l'arrière (23° au tableau !) va en se fermant vers l'étrave, se terminant en lame de couteau. Ce dernier adopte un diamètre "à l'anglaise" (44 cm seulement), conférant à l'Alugator une silhouette de sylphide. Il n'est d'ailleurs pas étonnant d'apprendre que la confection du flotteur a été confiée à Henshaw, spécialiste anglais qui fournit de nombreux chantiers outre-Manche. Autre détail physique, la carène est très basse, avec une proue peu défendue. On notera cependant la ligne de quille légèrement "bananée"… Cette forme de carène a par contre l'avantage d'une longueur exceptionnelle à la flottaison. D'abord en raison de l'étrave verticale, ensuite, parce qu'elle se prolonge de part et d'autre de l'embase moteur, presque jusqu'aux cônes des flotteurs. Passé ces considérations techniques, détaillons le cockpit… Premier constat, positif : la facilité de circulation de la poupe à la proue. L'Alugator est doté de larges passavants, de chaque côté de la console, et d'un généreux accès à la plate-forme de bain, elle-même spacieuse. Ce dernier est protégé par un portillon transparent, en l'occurrence un petit panneau de Plexiglas. A l'avant, les coffres disposés en U laissent un accès aisé au mouillage. Cet espace peut être comblé par une table de pique-nique qui s'abaisse pour former un beau solarium. Par ailleurs, l'Alugator offre de nombreuses places assises : trois, et même quatre, sur la banquette de poupe, avec le petit strapontin qui comble le passage latéral, deux sur le siège de pilotage et une sur le siège-glacière, devant la console. Soit sept au total. La laque noire donne une belle finition à l'Alugator, dont l'orange vif des coussins se marie avec un égal bonheur au Deck-king (faux teck) qui habille le pont. Concernant l'accastillage, tout n'était pas encore monté sur le prototype, à l'exemple de l'échelle de bain et de la douchette qui feront partie de la dotation standard. Il n'y a d'ailleurs pas d'options sur ce semi-rigide livré complet, en raison de la volonté du constructeur de viser d'emblée le haut de gamme. On notera, pour l'amarrage, la présence d'une bitte inox dans la pointe avant, et de longues mais courantes en alu, fixées sur les hiloires du cockpit. Le cockpit est autovideur et le câblage coure bien entendu sous le plancher. La touche finale, de cet ensemble au style "edge design" affirmé, est sans conteste l'éclairage de courtoise (leds de couleurs rouge), pour les escales du soir Inutile de dire notre curiosité avant de démarrer le 200 Verado. Comment va bien pouvoir se comporter cette carène ? C'est parti ! Le Mercury pousse fort et notre semi-rigide plane avant même les trois secondes, au terme d'un cabrage modéré. Dès lors, on constate un comportement très particulier avec un marsouinage naturel (nécessaire ?) qui permet à l'étrave perce-vague de venir "travailler" la vague, et de procurer un confort assez surprenant dans le gros clapot. Ce toucher de mer, un peu déroutant, ne se corrige pas en trimant en négatif, l'Alugartor ne semblant réagir qu'au trim positif. Notre impression, c'est que le nez est un peu léger, surtout par vent fort et mer formée de face, comme à Perros Guirec ce jour-là. Pour autant, le comportement et les réactions de l'Alugator restent sains. Dommage que l'accélérateur électronique DTS perturbe le feeling entre le pilote et le moteur, à tel point que dans les sauts de vague, on se retrouve avec des remises de gaz à contretemps… C'est donc un peu frustré que nous sommes passés aux mesures de vitesse, sans avoir réellement pu juger du comportement dans la vague… Pour ce qui est de la vitesse de pointe, et malgré un poids relativement contenu (750 kg de coque), nous n'avons pu atteindre les 40 nœuds, mais sur un plan d'eau, il est vrai, un peu capricieux. Dans de meilleures conditions, l'Alugator devrait pouvoir les réaliser… A plein régime, la tenue de cap reste sereine (pas de roulis, pas de coups de raquette), mais la carène prend beaucoup d'air, et le mouvement de pompage, s'il s'atténue, persiste quand même. De fait, on aurait pu craindre un comportement erratique en virage… Il n'en est rien, heureusement, et l'Alugator vire avec une belle facilité, alliant grip et précision dans la trajectoire. L'allure de croisière idéale s'établit autour de 4 000 tr/mn, soit à un peu plus de 20 nœuds, avec un fonctionnement mécanique discret et une étrave qui amortit parfaitement un clapot de 80 cm. Par contre, on ressent l'écoulement de l'eau sous la carène, comme si l'aluminium ondulait. Curieux..



photo Alugator 680


photo Alugator 680


photo Alugator 680





CONCLUSION
Voilà une découverte qui nous change de l'ordinaire ! Que ce soit esthétiquement parlant (un look accrocheur !) ou sur le plan du comportement marin, l'Alugator marque sa différence. Encore une initiative intéressante de la part d'un néo-constructeur français, comme si ceux-ci s'étaient donné le mot… Même à l'état de prototype, ce semi-rigide en aluminium exerce un charme indéniable, par la qualité de sa réalisation et l'espace de vie qu'il propose.




Maxi_09032009-114547image_4
Maxi_09032009-114632image_2
je suis la
Maxi_09032009-114547image_5 Maxi_09032009-114547image_6 Maxi_09032009-114632image_3