Essai paru le 24/01/2019
L’an passé, le motoriste japonais procédait au lifting de son milieu de gamme, pour des puissances de 40 à 100 chevaux. Cette fois-ci, ce sont les gros cubes (175, 225, 200 et 250 ch) qui bénéficient d’un coup de boost, surtout les BF175, 200 et 225 qui ont le privilège de recevoir le bloc du BF250, lui-même amélioré. Découvrons ces nouveaux V6…
Texte Philippe Leblond – Philippe Leblond et DR
C’est à Mandelieu La Napoule que la filiale française de Honda Marine a donné rendez-vous à la presse spécialisée pour la prise en main de trois des quatre V6 qui viennent de recevoir des évolutions techniques que nous allons vous détailler. Les trois puissances concernées sont les 175, 200 et 250 ch. Précisons que le BF225 partage bien le même bloc moteur que les trois autres modèles, mais il n’était pas de la partie pour les essais. Avant de prendre la barre des bateaux mis à disposition (deux coques rigides et deux semi-rigides), voyons quelles sont les choses qui ont changé…
Plus de 100 points améliorés !
L’architecture V6 ne date pas d’hier chez Honda, mais devant la montée en gamme de la concurrence (jusqu’à 425 ch), ce grand motoriste universel (auto, moto, marine, aviation…), qui écoule près de 30 millions de propulseurs à l’année (!), a senti le besoin de donner un coup de pouce à ses hors-bord du sommet de gamme, à savoir les V6. Dans cette opération, Honda n’a pas ajouté de niveau de puissance supplémentaire. En l’espèce, le changement majeur réside dans le fait que les BF175, BF200 et BF225 abandonnent leur bloc de 3 471 cm3 pour adopter celui du BF150, cubant un peu plus avec ses 3 583 cm3, ceci devant compenser l’excédent de poids (29 kg de plus). Ainsi, en termes de cylindrée, les Honda se rapprochent des Suzuki, tout en se situant au-dessus des Yamaha (pour les 175 et 200 ch), des Mercury (sauf le 250 ch) et des Evinrude. Une façon, pour Honda, de combler un tant soit peu son déficit dans le domaine du hors-bord de forte puissance. En attendant mieux…
Sans les citer toutes, les évolutions (plus de 100 points améliorés), au regard de l’ancien BF250, sont légion et profitent aux quatre puissances : traitement anticorrosion renforcé, nouveau système d’ouverture de capot plus pratique celui-ci comportant aussi des protections en matériau souple (bumpers), prises d’air redessinées avec grille en forme de nid d’abeille, donnant une note plus sportive et évitant tout risque d’entrée d’eau sous le capot et à l’admission d’air, échappement retravaillé, cartographie d’injection recalibrée, simplification des opérations de maintenance pour un coût d’entretien revu à la baisse… Exemple : le diamètre de l’évacuation d’huile moteur passe de 9,2 mm à 12 mm occasionnant un gain de temps de 6 minutes (4 au lieu de 10), ou le remplacement du trim sans dépose moteur (10 minutes au lieu de 60). Idem pour le changement des filtres…
Un régime moteur ajustable pour la pêche à la traîne
Par ailleurs, le V6 de 3 583 cm3 permet aux 175, 200 et 225 ch, de disposer d’un rapport d’embase de 2.00 : 1 au lieu de 1.86 : 1 avec l’ancien bloc de 3 471 cm3. Conséquence : plus de couple au démarrage et la possibilité de monter des hélices de plus grand diamètre, un avantage pour propulser des bateaux lourds ou naviguant chargés. On note aussi que pour ces trois puissances, le régime maxi est inférieur de 300 tr/min à celui du 250 ch. Pour plus de facilité de pilotage, il y a aussi la synchronisation des régimes (jusqu’à quatre moteurs), et le système d’ajustement de régime par plages de 50 tr/min entre 600 et 1 000 tr/min pour les manœuvres de port ou la pêche à la traîne. Pour ce qui est du système V-Tec (admission variable), il est réservé aux BF225 et BF250. Par contre, ces quatre nouveaux V6 sont tous équipés de la connectivité NMEA 2000, permettant d’interfacer le moteur et l’électronique du bord avec un seul câble.
Concernant les organes périphériques, les V6 Honda reçoivent de nouvelles commandes électriques (livraison printemps 2019), mais restent aussi disponibles avec des commandes à câbles (déjà à la vente), à l’exception du BF175 qui n’est proposé qu’en électrique. De la même manière, ce dernier est disponible en arbre extra long et ultra long, mais pas en arbre long, à la différence des trois puissances supérieures qui figurent au catalogue avec les trois longueurs d’arbre. Cette nouvelle gamme de V6 s’accompagne aussi d’un nouvel afficheur LCD 4 pouces, avec menu pour passer en revue de nombreuses informations en provenance du moteur et notamment la consommation journalière. Le tableau de bord intègre également un système de démarrage « start & stop », par simple pression sur un bouton accompagné d’un système de démarrage sans clé (clé électronique codée permettant de démarrer le moteur jusqu’à trois mètres de distance). En cas de tentative de vol avec une autre clé, le système d’immobilisation désactive le moteur, rendant le démarrage impossible. Et pour ne rien gâter, la puissance administrative de ce bloc V6 étant inférieure à 22 CV, les éventuels utilisateurs de ces puissances équipés de bateaux de moins de sept mètres seront exonérés de la taxe sur le moteur, à condition de ne pas sortir des eaux territoriales françaises. Par contre, si au plan esthétique, les V6 Honda affichent toujours un très élégant dessin, légèrement « racingnisé », ils ne sont toujours pas proposés dans des couleurs différentes, à la différence de la plupart des concurrents qui ont ouvert, à des degrés divers, une porte sur la personnalisation.
Les responsables de Honda Marine ont profité de ces essais presse pour rappeler les partenariats les liant aux marques de bateaux suivantes, pour des ventes en packages : Highfield, Mar.Sea et Ranieri pour les semi-rigides, Eolo, Ocqueteau et Ranieri pour les rigides.
Des régimes économiques avec le Highfield
Il est temps maintenant de prendre la barre des quatre bateaux mis à notre disposition. Procédons par ordre croissant de puissances. Pour le BF175, la monture est un Eolo de 7,30 m, day-cruiser italien dont le poids va s’avérer pénalisant. Le poids, avec 1150 kg sans moteur sur la bascule, mais aussi un montage moteur trop bas, surtout compte tenu de l’important déport arrière, l’Eolo étant équipé d’une chaise moteur. L’assiette longitudinale trop sensible (marsouinage) n’a pas aidé aux performances, que ce soit lors du déjaugeage avec un cabrage marqué (le chrono de 3’’9 est tout de même satisfaisant) et la vitesse de pointe plafonnant à… 33,6 nœuds. Conséquence de ce double handicap, les rendements obtenus ne sont pas au niveau escompté. Heureusement, le meilleur d’entre eux (0,74 mille parcouru par litre consommé) correspond à une vitesse de croisière consistante : 25,6 nœuds, à 4 500 tr/min. Un régime auquel, le nouveau BF175 nous a séduits par sa discrétion sonore. Il reste même assez sage jusqu’à 5 000 tr/min, là où généralement les autres hors-bord montent le son à partir de 4 000-4 500 tr/min. Si la luminosité du nouvel écran LCD Honda ne souffre guère au soleil, on aurait apprécié des caractères plus grands…
Second V6 à passer entre nos mains : le BF200. Monté sur le pêche-promenade Ostrea 800 (7,80 m) de chez Ocqueteau, le Honda 200 ch n’avait pas la tâche facile… Ce lourd esquif de 1 700 kg, conçu pour supporter jusqu’à 300 chevaux, a donné du fil à retordre au nouveau V6, avec pour résultats chiffrés une V-max de 33,8 nœuds, et des allures de croisière comprises entre 17 et 26 nœuds, assorties de rendements somme toute corrects, puisque de 0,66 et 0,63 mille par litre. Toutes proportions gardées, ces données sont meilleures que celles obtenues précédemment avec le BF175 dont le montage, il est vrai, était loin d’être optimal. Au crédit du V6, une belle accélération, avec la technologie « Blast » (coup de boost de l’injection et de l’allumage à bas régime), pour déjauger cette lourde unité en moins de 4 secondes. Ce qui nous conduit penser que ce moteur assure l’essentiel pour un bateau destiné avant tout à la pêche « tout-temps », tout en profitant du mode « trolling » avec ces ajustements de régimes par incréments de 50 tr/min, permettant de gérer sa vitesse de traîne entre 2,5 et 4,5 nœuds.
Troisième candidat à nos essais : le BF250. Ce moteur était monté sur deux semi-rigides. D’une part un modèle familial, le Mar.Sea 180 (7,49 m), de l’autre, un modèle plus polyvalent, voire baroudeur, l’Highfield Patrol 760 (7,60 m). Le premier sensiblement plus lourd (+ 375 kg), a tiré un excellent parti du Honda 250 ch, avec une V-max convaincante (41,2 nœuds) tout en signant des chronos d’accélération corrects, à l’image des rendements aux régimes de croisière, avec une fourchette allant de 0,82 à 0,74 mille par litre. Au-delà des chiffres, il faut souligner l’agrément de pilotage avec un moteur souple et progressif à tous les régimes, et plutôt agréable à l’oreille, avec un très léger effet sonore dans les hauts régimes dû au V-Tec. Mais, le grand gagnant en termes de performances et de plaisir de pilotage est indiscutablement l’ensemble formé par le BF250 et l’Highfield Patrol 760. Léger, du fait de sa construction aluminium, réactif et même sportif, tout en restant bien équilibré et sain dans ses réactions, ce semi-rigide de 25 pieds a signé de belles perfs’, avec une pointe de vitesse de 44,2 nœuds, des montées en régime énergiques (6’’9 seulement pour passer les 30 nœuds) et surtout des rendements particulièrement économiques avec, notamment, presque un mille par litre à 19 et 25 nœuds, mettant en relief l’efficacité de la technologie ECOmo, dont le calculateur gère de manière optimale l’allumage et l’arrivée de carburant aux régimes intermédiaires. Autre bon point à mettre au crédit de cet ensemble sportif, de belles reprises en sorties de virages.