Comparatif: MERCURY F 350 Sci Verado VS Verado 400

La grosse cavalerie !

*Le politiquement correct n'a guère de prise sur la stratégie des constructeurs de moteurs hors-bord. La montée en puissance des gammes reste une réalité que Mercury Marine assume avec brio en lançant, simultanément, deux super Verado de 350 et 400 ch. Nous avons pu les découvrir, en action, à Dubaï et à Mandelieu. Chargez !*

Photos Philippe Leblond, Franck Van Espen et Mercury Marine


 30 751 € (F350 SCi Verado) - 39 363 € (Verado 400R)

Essai paru le 01/07/2015



C'est à l'occasion du Miami Boat Show, en février dernier, que Mercury Marine a levé le voile, au cours d'une mise en scène musclée, sur ses deux hors-bord les plus puissants. Bien sûr, nous connaissions le Verado 350 Sci, mais ce dernier était assorti du label "Racing" et ne faisait donc pas partie de la gamme "régulière". Or, ce nouveau 350 intègre la série des Verado destinés aux plaisanciers. Pour ce qui est du nouveau 400R, il vient remplacer le 350 SCi au sommet d'une gamme Racing dont les propulseurs s'adressent en priorité aux pilotes offshore et aux professionnels, à l'exception des loueurs.
Pour ces deux nouveaux venus, bien qu'ils soient élaborés à partir du même bloc de 2,6 litres que celui des autres Verado six cylindres en ligne (de 225 à 300 ch), la firme de Fond-du-Lac (Wisconsin) n'a pas ménagé ses efforts pour mettre au point ces puissantes mécaniques. Ainsi, ce ne sont pas moins de 282 ingénieurs qui ont été mobilisés pour l'occasion, totalisant 109 359 heures de recherche et mobilisant 13 bateaux d'essais !
Physiquement, le Verado 350 est à peine plus lourd que son "petit" frère le 300 (+ 3kg). Mais, il revendique surtout 43 kilos de moins que celui qui est actuellement son seul concurrent à ce niveau de puissance, le colossal V8 Yamaha de 350 ch. Quant au Verado 400R, qui fait le même poids que ce nouveu 350, il affiche tout bonnement le meilleur rapport poids/puissance jamais atteint par un hors-bord 4 temps, avec 0,76 kilo par cheval, et la plus haute puissance spécifique avec 153 ch/litre ! Ces ratios fabuleux sont bien sûr à mettre au crédit de la suralimentation qui permet à Mercury d'opter, concernant les blocs de ses Verado (les seuls hors-bords à compresseur du marché), pour une cylindrée réduite. Rappelons que celle du Yamaha 350 ch est de 5 330 cm3, soit plus du double de celle des deux nouveaux Verado ! Ainsi, à un meilleur rapport poids/puissance, Mercury ajoute une taxation nettement plus "light", le Verado 350 bénéficiant d'une puissance fiscale très contenue au regard de sa puissance. Par ailleurs, l'étroitesse des têtes motrices, due à l'architecture "6 cylindres en ligne", facilite les montages multiples. Un avantage relatif en Europe, où le prix du carburant est élevé, mais fort apprécié dans des pays comme ceux du Golfe Persique et les Etats-Unis, où le litre de super coûte une bouchée de pain (et encore, pas du Poilâne !).
Les efforts considérables consentis par le motoriste américain pour l'élaboration de ces nouveaux Verado, laissent deviner qu'il ne s'est pas contenté de dupliquer le fameux bloc L6 de 2,6 litres. De nombreuses améliorations ont été apportées par rapport aux Verado 300 et 350 SCi… Interrogé sur l’évolution des moteurs de la gamme Verado, Max Métadier, directeur général de Mercury France, insiste sur la technologie avancée dont bénéficient ces deux nouveaux propulseurs. "Sur les Verado six cylindres, nous en sommes à la cinquième génération. Le bloc 2,6 litres que l’on connaît était jusqu'ici décliné en 225, 250 et 300 ch, et Mercury Marine a profité du Miami Boat Show pour lancer des versions 350 et 400 ch sur lesquelles a été monté un nouveau compresseur volumétrique refroidi par eau.

Il y avait déjà un intercooler en sorti de compresseur mais cette fois-ci, le compresseur lui-même est refroidi. Toute l’admission d’air a été revue avec une aspiration désormais placée sur l’arrière du moteur. Le 350 et le 400 ont les mêmes structures mécaniques, la différence de puissance provient essentiellement de la calibration avec, pour le 400 ch, un régime qui peut monter jusqu’à 7 000 tr/min, tandis que le 350 ch se contente de 6 400 tr/min. Entre le 350 et le 400 R, la cartographie change, on a un nouveau compresseur volumétrique et ensuite tout un travail a été appliqué pour réduire les frottements grâce une nouvelle culasse, permettant ainsi de réduire la consommation du moteur."
Par ailleurs, la cuvette moteur a été redessinée (AMS, pour Advanced Mid Section), afin de réduire encore les vibrations du moteur. Le circuit d'admission d'air frais a également été revu avec un volume supérieur et un chemin plus direct vers le collecteur qui alimente le compresseur. Mercury Marine évoque un gain de 10% de puissance avec le refroidissement liquide du compresseur, et une économie de 5 à 10% de carburant par rapport aux moteurs concurrents. Les opérations de maintenance sont également limitées, notamment grâce à la distribution par chaîne qui ne nécessite pas d'intervention lourde comme le remplacement de la courroie sur la plupart des autres mécaniques. Précisons aussi que le 400R dont le régime maxi, porté à 7 000 tr/min (plus haut régime de rotation pour un hors-bord de série), peut-être équipé de plusieurs types d'embases, dont une dotée du fameux "nose cone" qui procure une finesse hydrodynamique de premier ordre, d'hélices haute performance, telle la Pro Max à quatre pales avec un "rake" très marqué, et de commandes DTS type compétition "Zero Effort", totalement digitales. Bien sûr, ces nouveaux Verado bénéficient d'instruments périphériques numériques qui facilitent le pilotage, grâce à des technologies telles que les commandes électroniques d'inversion de marche et d'accélération (DTS), le Joystick Piloting (aide à la manœuvre intuitive), le Skyhook (ancre virtuelle), le mode Shadow (synchronisation de l'accélération de plusieurs moteurs sur un seul levier), ou grâce aux informations qui sont divulguées via le SmartCraft et son VesselView (écran multifonction interfaçable avec le GPS). Enfin, Mercury ne voulant pas laisser à Suzuki, et surtout Evinrude, le privilège du choix dans la couleur de son moteur, le motoriste de Fond-du-Lac propose le 350 en trois teintes : noir, blanc froid (Cold Fusion White) et blanc chaud (Warm Fusion White). Pour sa part, le 400R est disponible en noir ou blanc (Cold Fusion White), mais s'enrichit d'un choix de motif de capot en six coloris ou façon "fibres de carbone".
Pour l'heure, le Verado 400 Racing est commercialisé par le concessionnaire "High performance" Espace Power (Bormes-les-Mimosas), à l'usage exclusif des pilotes détenteurs d'une licence FFM compétition et des professionnels (hors loueurs), sachant que ce moteur n'est pas encore homologué CE. Mais il n'est pas impossible que le 400R soit compatible avec les prochaines normes RCD 2 (Recreational Craft Directive) qui devraient entrer en application en 2017. Ce qui, dans ce cas, laisserait une porte ouverte aux plaisanciers pour profiter de cette mécanique d'exception.
Concernant les tarifs, si le Verado 400R devient le plus cher des hors-bords de notre marché, le Verado 350 s'affiche sensiblement moins haut que son rival Yamaha (30 751 € contre 33 870 €). Pour ce qui est de l'option aide à la manœuvre électronique, Yamaha ne fournit pas d'indication quant au tarif de son Helm Master, alors que Mercury facture son Joystick Piloting à partir de 15 949 € (montage bimoteur).

*Mercury Verado 350 sur IMG 400 XS*
Notre première prise de contact avec le Verado 350 s'est effectuée à Dubaï, au large de la marina éponyme, avec pour toile de fond une forêt de gratte-ciels parmi les plus hauts du monde. Monté en triple sur l'IMG 400, un fishing de sport de 12 mètres de la production locale, le 350 n'a pas tardé à laisser parler sa puissance, avec une solide accélération, accompagnée de ce son rauque laissant entendre un léger sifflement, caractéristique du six cylindres en ligne Verado. Sur cette carène à double redan, très comparable à celle des sportfishing à console centrale américains, nous avons atteint 54,7 nœuds, avec des hélices sans doute un peu courtes, puisque malgré un chargement conséquent (7 personnes et 1 500 litres de carburant) les moteurs ont légèrement dépassé leur régime maxi, avec 6 450 tr/min. D'après le pilote, la V-max à mi-charge serait de 62 nœuds… Sans doute, aussi, avec des hélices au pas plus long. Par ailleurs, si à Dubaï le plan d'eau était particulièrement clément, la température de l'eau à 28 degrés et la chaleur ambiante (39 degrés à l'ombre !) n'étaient pas favorables à l'optimisation des performances, à la différence d'un air frais à l'admission qui "booste" la puissance.
Quoi qu'il en soit, nous avons pu apprécier le souffle des nouveaux Verado, et il nous semble aussi - mais, le montage triple fausse peut-être aussi cette impression - une mise en route du compresseur plus discrète que sur les autres Verado. A 27 nœuds à 3 500 tr/min, en vitesse de croisière économique (si l'on peut dire…), le trio de 350 ch se montre discret, et c'est encore le cas à 4 000 tr/min, au-dessus de 30 noeuds. En croisière rapide, nous n'avons pas pu relever de mesure, mais on peut estimer que l'IMG 40' filera entre 40 et 45 nœuds dans la fourchette de 4 500 tr/min à 5 000 tr/min. Avec une consommation maxi relevée à 366 l/h (soit 122 l/h par moteur), on peut tabler sur environ 140 l/h au total, à 4 000 tr/min.

*Mercury Verado 350 sur Joker Boat Clubman 28*
Hasard de notre métier, nous avions pu essayer le même bateau, il y a quelques mois avec le Yamaha 300 ch 4 temps. De quoi faire un rapprochement avec le nouveau Verado même si ce dernier affiche tout de même une puissance supplémentaire de 50 chevaux. En vitesse de pointe le Verado gagne tout de même six nœuds, mais cette performance s’obtient au détriment d'une consommation supérieure de près de 20 litres, au régime maxi. La montée en régime sur le Verado nous a semblé beaucoup plus linéaire avec un effet de couple un peu moins présent dans les tours mais tout de même très efficace. Il faudra, toutefois, ne pas hésiter à utiliser le powertrim du Verado au maximum de ses possibilités, presque à la limite de la cavitation de l’hélice, pour que le bateau puisse obtenir sa glisse optimale. A plein régime, soit près de 6 300 tr/min, le moteur ne semble pas à bout de souffle et dégage une sonorité qui demeure encore fort agréable. Pas de problème majeur en virage serré, où il faudra simplement abaisser le moteur pour réaligner le centre de poussée de l’hélice afin de passer toute la puissance en sortie de courbe.

*Mercury Verado 400R sur Victory Team 57'*
C'est à nouveau sur une carène à double redan, mais cette fois-ci issue des ateliers du fameux Victorry Team de Dubaï, plusieurs fois champion du monde Offshore, que nous avons pu goûter nos premières impressions de 400R. Nous devrions dire "des 400R", puisqu'ils étaient au nombre de quatre sur le tableau arrière de cet open à console centrale de 57 pieds (!), dont la coque est en sandwich polyester, mais les éléments de pont en carbone. 1 600 ch, ça pousse au démarrage ! Notre pilote parle d'un 0 à 65 mph (soit 0 à 56 nds) en seulement 60 mètres ! Et les tours géantes de la Marina ont vite fait de ne plus ressembler qu'à un lointain décor de carton pâte… Le sillage, atomisé à souhait, s'étire très loin au-delà des capots blancs "glacier" de nos quatre Verado 400 Racing. Là encore, l'effet coup de pied aux fesses typique des Verado semble lissé par la multi motorisation. Autre constat : le feulement des six cylindres demeure plutôt dans les basses, alors qu'avec des régimes grimpant à 7 000 tr/min, on pouvait s'attendre à un concert de ténors… Il est encore surprenant de constater la discrétion sonore affichée en vitesse de croisière (c'est-à-dire à plus de 40 nœuds !) par ces quatre hors-bord destinés à la course offshore. La réactivité aux gaz est immédiate, mais cette énorme puissance semble arriver en bon ordre, maîtrisée. Ce qui laisse à nouveau cette impression de perfection que l'on avait pu ressentir lors de l'essai des premiers Verado, à Miami en 2004.

*Mercury Verado 400R sur Bernico F1 CXX*
Ce moteur qui n’est pas encore homologué en France, donc uniquement réservé à un usage compétition, a été monté sur une coque rigide Bernico. Un chantier belge peu connu et qui a pourtant une très forte expérience dans la fabrication et la mise au point de bateaux pour la course offshore. Malheureusement, faute de temps et d’essais, le montage de ce Verado 400 ch, qui nécessite une très grande précision, n’était pas optimum pour que l'on puisse exploiter le Bernico F1 jusque dans ses limites. Nous avons toutefois pu réaliser le fort potentiel du moteur, avec une hélice de 28 pouces, en atteignant près de 50,8 nœuds à seulement… 5 200 tr/min. Une performance déjà élevée lorsque l’on sait que le régime maximal peut grimper jusqu’à 7 000 tr/min ! Il faudra toutefois que le pilote soit très expérimenté et que le bateau soit parfaitement équilibré.