Dans le paysage pourtant varié du semi-rigide, l'Hysucat est un drôle d'oiseau. Aperçu pour la première fois lors du Ribex, au printemps dernier, il se posait quatre mois plus tard au Grand Pavois. C'est là que nous avons fait quelques milles à son bord, appréciant sa vélocité et son comportement… planant.
Texte et photos Philippe Leblond
Les Hysucat sont des bateaux rigides et semi-rigides construits en Afrique du Sud, au Cap, par la compagnie anglaise Watermarque Marine, basée à Manchester. Leur singularité tient essentiellement à leur carène de type catamaran, à double tunnel et hydrofoils. Cette dernière est l'œuvre de l'architecte naval sud-africain Malan Conradie. Pour l'étude des foils (une grande aile en forme de chevron, à mi-longueur, reliant les deux patins, deux plus petits à la proue), il a été secondé par le Professeur Hoppe de l'Université de Stellenbosch, par ailleurs haut lieu de l'éducation rugbystique des futurs Springboks. Selon le constructeur, cette architecture génère un effet de portance qui augmente le confort dans la vague, l'air induit dans les tunnels faisant office d'amortisseur, comme sur tout catamaran de vitesse. S'il est une autre originalité, c'est bien la position divergente des deux hors-bord, embases inclinées vers l'extérieur ! Le 8M Fast Rib est le plus grand des quatre semi-rigides (de 6,50 m à 8,00 m) construits par ce chantier. La finition reste perfectible, mais on se félicitera de la confection des tubes en tissu Orca (type Néoprène/Hypalon), car les semi-rigides venus d'Afrique du Sud sont souvent en PVC. Ajoutons que le modèle que nous avons essayé est en cours d'évolution, notamment sur le plan de l'aménagement de pont, avec une définition plus "familiale" (illustration 3D), voire "day-charter", une console/WC et de très nombreuses vraies places assises (neuf en arrière de la console et deux sur l'avant de celle-ci, d'un design plus tendance). Par contre, avec ce poste de pilotage plus ample, abritant mieux pilote et copilote, les passavants seront moins larges… Sur notre bateau d'essai, la facilité de circulation est à souligner, et ce malgré une largeur très contenue puisque ce catamaran s'avère plus étroit qu'un semi-rigide monocoque de même longueur, ces derniers atteignant souvent les 3 mètres. Une étroitesse bien anglaise (voir les Revenger, Scorpion et autres Solent) donc pour l'Hysucat, qui offre un volume de rangement correct : coffres sous la banquette arrière, la console et le siège de la pointe avant. Le puits de mouillage, lui, se trouve au-dessus, intégré à la delpinière. Question places assises, l'Hysucat se montre généreux, avec quatre Ullman à amortisseurs et une banquette pleine largeur (trois places), sans compter les deux petites places du siège devant la console, utilisables par mer calme. Rare sur un bateau de conception anglaise, un solarium est aussi proposé, convertible en petit carré. Un kit camping peut aussi couvrir toute la partie avant, pour qui veut passer la nuit au mouillage… Mais voyons, sans plus tarder, comment se comporte cette carène insolite… En fait, dès les premières accélérations, on éprouve quelque chose qui se situe entre le mono et le cata. Les aiguilles des compte-tours des deux Optimax 200 ch grimpent allègrement vers la zone rouge, tandis que l'air compressé sous les deux voûtes du tunnel commence à alléger le bateau. Notre GPS s'affole : 45 nds, 50, 55, encore un peu plus de trim… 59,3 nds ! Le plan d'eau, agité par un petit clapot désordonné de 30 à 40 cm, et un vent frôlant les trois beauforts ont sans doute compromis notre accession aux 60 nœuds, symboliques de la haute performance pour un bateau à moteur de plaisance. Pas mal quand même ! Même pour un cata. Encore que l'Hysucat ne procure pas tout à fait les mêmes sensations qu'un cata d'offshore. Le coussin d'air est moins généreux, et l'assiette, très plate (sans jeu de mots), donne l'impression que quelque chose relie le bateau au plan d'eau. Sans doute l'effet des foils… L'autre sensation, un peu bizarre, c'est la tenue de cap un peu floue, le bateau effectuant un léger mouvement de lacet, quoique s'atténuant au fur et à mesure qu'on le prend en main. Par contre, l'équilibre, tant longitudinal que latéral, semble imperturbable, même lorsque nous croisons les sillages d'autres bateaux. En virage aussi, l'Hysucat assure bien, avec des trajectoires précises, un grip tenace et un passage à plat qui oblige les trois passagers à se cramponner à leur Ullman. En dépit (ou à cause) de leur étrange inclinaison, les moteurs profitent d'une motricité intacte pour relancer le bateau comme une balle en sortie de virage. Et c'est reparti pour un tour, au son rageur des 2-temps Mercury à embase XL, équipés d'hélice Cleaver (type compétition) à pas long (29 pouces !). Un choix très en faveur de la vitesse de pointe, mais qui ne prive pas l'Hysucat d'un déjaugeage fulgurant, et du régime maxi motoriste, grâce notamment à son étonnante légèreté (700 kg pour 8 m !).
AU PONTON
Le chantier propose un aménagement de pont en partie "à la carte". Ce qui explique la différence entre notre bateau d'essai et l'image 3D (ci-contre) montrant la nouvelle console, plus large et d'un design plus actuel, et un nombre de sièges en augmentation.
Relativement étroit (surtout pour un cata) l'Hysucat regagne de la surface intérieure grâce à son avant un peu carré.
EN MER
L'attitude de l'Hysucat en navigation se rapproche de celle d'un pur catamaran, avec un effet de sustentation dû à la compression de l'air dans ses deux demi tunnels, ainsi qu'à l'action de portance de ses foils. Cette surface mouillée réduite lui autorise une belle vitesse de pointe. Son comportement en virage est aussi typique, avec un passage à plat et un fort grip latéral qui oblige l'équipage à bien se tenir. À cet égard, les sièges Ullman, ou tout autres sièges de type jockey, sont les bienvenus !