Le chantier de Pietrosella, Fanale Marine, a dès sa création il n’y a pas encore dix ans, pris l’habitude de donner des noms d’oiseaux à ses semi-rigides. Ce 900 Cabine n’échappe pas à la règle adoptant celui d’Altore, un rapace qui fréquente les montagnes corses. Pourtant, ce nouveau modèle, qui était exposé au Cannes Yachting Festival, n’a pas grand chose de commun avec un prédateur, si ce n’est une envergure respectable avec ses 3,18 m de largeur. 

Au ponton

Bien campé sur ses deux gros flotteurs, l’Altore, amarré arrière à quai, nous tend sa longue plateforme tribord pour embarquer. Un passage en avant du Suzuki 350 ch permet de se rendre sur celle située à bâbord qui supporte l’échelle de bain non coffrée. L’accès à la baignade est commode et la douchette, placée à porter de main pour se dessaler avant de s’asseoir autour de la table pour un pique-nique en règle. Lieu de partage par excellence, ce carré avec banquette en U et table amovible, réglable en hauteur pour la conversion en bain de soleil (100 x 177 cm), peut accueillir quatre à six adultes. La « zone » arrière propose également une prise de quai, le nable de remplissage du réservoir d’eau et deux gros taquets fixes, bien accessibles, pour l’amarrage de la poupe. L’assise de la banquette se relève dévoilant une grande cale et deux coffres latéraux. C’est logiquement qu’au dos du poste de pilotage se dresse un bloc-cuisine avec évier moulé dans le polyester, une grande planche à découper et un frigo garant d’un apéro bien frais. Le chantier propose en option un réchaud. Le meuble intègre aussi deux haut-parleurs de la sono Fusion et comporte une main courante qui pourra servir à deux passagers préférant naviguer debout dans la mer formée.

Le poste de pilotage comporte deux places sur une même assise dont une partie est redevable afin de parfaire sa position de pilotage debout, en appui lombaire. En position assise, le pilote bénéficie aussi d’un repose-pieds, ce qui n’est pas le cas du copilote, compte tenu de la présence de la porte de cabine face à lui. Il lui manque également une poignée pour se tenir en navigation… Quant au tableau de bord, bien qu’il ne soit pas très spacieux, il intègre l’essentiel : un combiné Garmin à écran 12’’, l’afficheur du V6 Suzuki, un compas analogique bien dans l’axe de vision du pilote, un compteur de chaîne, et la stéréo Fusion. Un bon point aussi pour le vide-poches situé sous le volant. Ce dernier et le boîtier de commande sont à bonne hauteur et bonne distance.

Pour se rendre sur le pont avant, il faut monter les deux marches qui correspondent au volume de la cabine. L’armature inox du T-top assure une bonne prise et les larges passavants (38 cm) facilitent l’accès au pont avant. Ce dernier est entièrement dédié à un solarium de grande envergure (255 x 215 cm !), sécurisé sur toute sa longueur par un balcon ce qui fait qu’on peut, par mer calme, prolonger sa séance UV en navigation. Un coussin circulaire amovible permet de mettre au jour le capot de pont de la cabine. Celle-ci se dévoile une fois poussée la porte coulissante en plexiglass teinté. L’aménagement est des plus simples et, en l’absence de hublots latéraux, la seule source de lumière naturelle est le capot de pont. un petit banc borde le flanc gauche avec en vis-à-vis un WC marin, coffré mais en open space avec la couchette double qui offre de belles dimensions : 220 x 160 cm (au plus large). On trouve également un beau volume de rangement sous le matelas. Pas de fioritures pour ce qui est de la décoration : les flancs et le plafond sont nus de vaigrage, laissant paraître le gel-coat brillant du polyester.          

Pour résumer, ce grand semi-rigide (le deuxième de la gamme par la taille derrière le Libeccio 1000 - voir notre essai sur ce même site) sait se faire accueillant, tout en arborant une finition simple. Sa cabine permet de prolonger les séjours en mer dans le cadre de courtes croisières. Bien placé en prix, l’Altore fait cependant l’impasse sur certains équipements qui, sur un semi-rigide de cette importance, devraient faire partie de la dotation standard : guideau électrique, douche de pont et table, notamment…

En mer

Par un vent de sud-est de force 3 (clapot de 60 cm), l’Altore 900 Cabin s’avère confortable pour l’équipage, même à un régime de croisière élevé, à 4 500 tr/min, soit 27 noeuds, rythme naturel pour ce grand semi-rigide et son V6 Suzuki de forte cylindrée (4 390 cm3) qui distille une sonorité à la fois discrète et agréable. De surcroît, ce régime s’avère être celui du meilleur rendement moteur avec un ratio de 0,53 mille parcouru par litre consommé. Toutefois, aussi coupleux que puisse être le DF350 à double hélice contre rotative, un semi-rigide de ce gabarit réclame une certaine énergie pour déjauger. Pour l’Altore c’est à partir de 3 000 tr/min et 17,3 noeuds. En général, le déjaugeage s’effectue entre 2 300 et 2 700 tr/min, à 13-15 nœuds. Il est vrai que le rapport poids/puissance est modeste puisque chaque cheval doit pousser 6,1 kg… Au plan de la vitesse maxi on passe tout de même les 40 noeuds, bien trimé, avec six personnes à bord et malgré deux paramètres pénalisant : la peinture antifouling et le T-top qui, au doigt mouillé, doivent absorber 4 ou 5 noeuds à plein régime. Pour ce qui est des performances, le Suzuki 350 ch fait donc le job, mais sans plus (5’’3 pour déjauger et 7’’6 pour passer de 0 à 20 noeuds, c’est moyen) et nous conseillerons à ceux qui navigueront avec un équipage nombreux d’opter pour une motorisation bimoteur de 2 x 200 ch, soit la puissance maxi autorisée sur ce semi-rigide, avec l’avantage d’une cylindrée plus forte qu’un monomoteur de 400 ch. Exemple : deux Suzuki 200 ch V6 totalisent 7 228 cm3 contre 5 559 cm3 pour un Yamaha 400 ch. Or, sur des unités qui affichent un poids en ordre de marche de 3 tonnes environ, il faut du couple !

De ce que l’on a pu voir lors de cet essai, l’Altore 900 est tout à fait capable de supporter 400 chevaux. Bien équilibré en longitudinal (à l’aise par mer venant de face ou de l’arrière), il l’est aussi en latéral avec vent et mer par le travers. A aucun moment, même à la vitesse maxi avec un trim copieusement positif, il n’amorce un mouvement de roulis. Ce comportement sain, on le retrouve dans les virages de différents rayons que nous lui avons infligé. Quel que soit le niveau de gaz appliqué, il s’inscrit naturellement en courbe et adopte une gîte intérieure prononcée, assortie d’un grip ferme et régulier. Grâce à la double hélice, les remises de gaz en sortie de virage se font en pleine motricité. Au final, cet ensemble se défend bien et procure un agréable sentiment de sécurité.