Voilà de quoi continuer d'alimenter l'éternelle querelle d'école : pliable ou semi-rigide ? Difficile, en effet, de faire un choix entre ces deux frères de chantier qui n'en sont pas moins concurrents. Les départager revient plus à faire un choix « philosophique » qu'à se livrer au jeu des comparaisons.
Texte et photos Philippe Leblond
Certains d'entre vous se souviennent peut-être d'un feuilleton TV américain intitulé « Le riche et le pauvre »… Et bien, le cas de nos deux Lodestar n'a rien de comparable malgré les apparences. Ici, le jugement de valeur, le raisonnement manichéen ne tiennent pas, car ces deux canots gonflables sont plus proches qu'il n'y paraît, tant du point de vue des qualités nautiques que de l'équipement proposé. Reste, bien évidemment, et ce n'est pas rien, la différence de conception entre, d'une part le bateau pliable qu'est le Trimax et le semi-rigide qu'est le RIB. Revient alors le discours sur les conditions d'utilisation privilégiées par chacun. Le Trimax, qui teint dans deux sacs (142 x 75 x 45 cm + 106 x 68 x 14 cm) qu'il est encore possible de transporter dans le coffre d'un break et de stocker dans la cave de son habitation, donne cette possibilité propre au pneumatique pliable de « se faire oublier ». Pour le RIB, la remorque s'impose, et en corollaire, le lieu pour l'entreposer, que ce soit au port (si l'on n'a pas d'anneau) ou pour l'hivernage. Après, pour ce qui est du comportement en mer, où la carène rigide est censée apporter un plus en termes de confort et de rendement, le match est plus serré que sur le papier.
Précisons tout de suite que le Trimax n'est pas un pneumatique pliable ordinaire. Ses œuvres vives comportent deux flotteurs additionnels situés sous les flotteurs principaux. Ce qui donne à la carène une forme hybride, à mi-chemin entre le catamaran et le trimaran, en raison de la présence d'une quille gonflable. Ce profil hydrodynamique est censé générer, en navigation rapide, un effet de tunnel, donc de portance visant à réduire la surface mouillée, par la compression de l'air entre les deux « patins ». Avouons-le tout de suite, nous n'avons pas ressenti lors de l'essai, même à la vitesse maxi, cet effet de coussin d'air qui caractérise les catamarans utilisés en course inshore ou offshore. Sans doute existe-t-il ici de manière bien atténuée, apportant plus dans le domaine du confort que de la vitesse pure, en ce sens où il procure un léger amorti dans le clapot, rendant ainsi le Trimax plus confortable qu'un pneumatique de forme traditionnelle.Toutefois, il se montre légèrement plus véloce que le RIB, mais avec 10 chevaux de plus, compensant sans doute, en partie, par son effet cata, le handicap de glisse concédé par un pneu à fond souple face à un semi-rigide. C'est possible, car si l'on jette un œil aux fiches techniques, on constate que le RIB rend près de 20 kilos au Trimax.
Donc, sur le plan de la performance pure, le match s'avère très serré car avec un 30 ch, il n'est si évident que le Trimax soit distancé par le RIB…S'il est un domaine où, malgré sa surcharge pondérale, le Trimax écrase le RIB c'est dans l'exercice du chrono de déjaugeage : 1,9 seconde contre 3,4 secondes !Il y a bien sûr l'avantage du 40 ch, mais aussi la faculté du Trimax à réduire à son minimum le temps de la phase de cabrage. La bosse de déjaugeage est bien plus sensible avec le RIB, dont la carène met un certain temps à entrer dans ses lignes.Et pourtant, nous avons particulièrement apprécié le mariage entre le RIB et le Mercury 30 ch 2T qui s'avère épatant pour donner vie au pilotage du semi-rigide. Quel punch ! Le tout avec une sonorité rageuse pas désagréable du tout. Facile à tenir, même en barre franche, le RIB fait apprécier sa maniabilité tout en donnant un sentiment de sécurité que l'on n'a pas toujours lorsqu'on le pilote est seul à bord. Dans le clapot de (40 cm environ) de La Rochelle, le RIB fait apprécier un certain confort, et un comportement sain et précis en virage. Reste la vitesse de pointe un « poil » décevante… En terme de plaisir, le Trimax n'est pas en reste, et livre au pilote des sensations différentes, mais pas déstabilisantes pour autant. Ne serait-ce que pour le déjaugeage « atomique », on se plaît à mettre du gaz, et la barre franche reste précise et légère, même en virage, où il passe à plat comme un cata. L'impression de vitesse est omniprésente, et le confort dans le clapot acceptable. De retour au port, les deux pneus sont amarrés à couple. La surface de plancher du Trimax est légèrement supérieure, mais avec l'humidité son plancher adhère moins que l'antidérapant en pointe de diamant du RIB. Hormis son volumineux coffre avant (ou baille à mouillage), moulé dans le plancher, et le petit bac de rétention d'eau situé à la base du tableau arrière, le RIB n'offre rien de plus que le Trimax. Les flotteurs un peu plus gros de ce dernier sont configurés de la même manière : saisines en corde sur ralingues souples, passages plongeurs avec bandes de renfort, pagaies sur fixations situées sur la face extérieure (très bien pour libérer de la place pour s'asseoir), les mêmes poignées bon marché à l'ergonomie perfectible… Le tissu, un PVC de 1 100 décitex, fournit par l'allemand Haku Melher est assemblé à chaud (thermosoudure) et garanti cinq ans. Les deux bateaux sont équipés des mêmes nables de vidange de cockpit à guillotine, très pratiques. Bref, faire son choix entre ces deux pneumatiques de même taille mérite surtout de réfléchir à l'usage précis qu'on veut en faire.