Tout va bien dans le meilleur des mondes, serait-on tenté de dire, à bord du nouveau Nuova Jolly ! Celui-ci présente à la fois une silhouette de rêve, un plan de pont bicabine parfait pour le farniente et des allures de croisière on en peut plus sereines. Difficile de faire la fine bouche !
Texte Philippe Leblond – Photos Philippe Leblond et Aréfoto
Ses superstructures discrètes ne laissent pas deviner que le Prince 35 Sport Cabin recèle un tel confort intérieur. Pourtant, la cabine principale offre une vaste couchette double et une salle d'eau. Sa hauteur décente (1,70 m) et sa décoration à base de chêne clair en font un lieu agréable. Le propriétaire a ajouté un four micro-ondes sur le meuble de gauche, près de l'entrée, venant compléter l'équipement de la kitchenette extérieure. La finition est soignée (à l'exception des miroirs), comme on peut en juger dans la salle d'eau avec un meuble d'angle recouvert d'un plan de toilette en Corian supportant une vasque de lavabo en verre. Un caillebotis habille le puisard de la douche, tandis qu'un hublot ouvrant assure la ventilation au-dessus du WC électrique. L'aération de la cabine se fait grâce à un capot de pont circulaire et la porte coulissante en plexi. Un bon point supplémentaire : la descente est facilement praticable. Voilà pour les quartiers des parents, tandis que les deux enfants pourront se partager la cabine optionnelle, située sous le solarium de poupe. A moins que ce ne soit la "chambre d'ami", mais au singulier, car pour deux adultes, c'est un peu exigu (102 cm de large). Lorsque cette cabine est occupée, le grand capot reste entrouvert, et un taud sur mesure vient l'habiller sur les trois côtés. Alors, plus de soute arrière, nous direz-vous ? Vrai, mais lorsque la cabine est libre, elle dispense un volume de rangement assez comparable, avec l'avantage de garder le matériel au sec.
Le label "croisière" se justifie également par la présence d'un bloc-cuisine situé sous l'assise de pilotage : un frigo/tiroir à façade inox (capacité : 79 l), une plaque de cuisson à deux feux et un évier de taille raisonnable. De quoi se confectionner des repas chauds à bord. Tout près, le grand carré de pont en U permet d'asseoir confortablement sept à huit convives autour de la table en teck massif. Le réservoir d'eau douce (140 litres) devrait suffire à alimenter les deux douches du bord en situation de croisière… Un niveau de confort qui donne envie de larguer les amarres pour des horizons lointains !
Le Prince 35 sport Cabin sait aussi se faire apprécier pour ses deux spacieux bains de soleil, tous deux bordés de mains courantes, ce qui les rend utilisables en navigation par mer calme. L'imposante chaise moteurs Armstrong, revêtue de teck, comme le reste du pont, est facilement accessible pour la baignade, via de petits marche-pieds de part et d'autre du tableau arrière. La douchette est à portée de main à bâbord (à tribord, prudence, c'est la prise de quai !). Dommage, par contre, que l'échelle ne soit pas intégrée dans la plate-forme… De retour dans le cockpit, on passe aisément sous l'arceau polyester qui supporte les feux de navigation et le cabriolet. Par contre, lorsqu'on poursuit vers le pont avant on remarque immédiatement l'absence de main courante ne sachant pas trop où se tenir. Effilée, grâce aux flotteurs de diamètre dégressif, se terminant par une petite plate-forme habillée de teck, la proue est d'une rare élégance. Pourtant, elle renferme le puits de mouillage et le guindeau électrique. Pas de davier proéminent donc, l'ancre étant à poste dans son écubier, à l'étrave. Au "rayon" de l'accastillage, justement, Nuova Jolly a offert à son vaisseau-amiral (en attendant le Prince 43 et ses 13 m !) des taquets dignes d'un petit yacht. De quoi faire de la corvée de l'amarrage, un vrai plaisir. Terminons ce tour du propriétaire avec le rangement. En plus des cabines, le Prince 35 offre deux grands coffres : un sous la banquette arrière, non cloisonné mais doté de trois accès, et une belle soute en avant de la cabine s'ouvrant à l'aide d'un panneau de pont.
L'instant est venu de quitter le port de la Rague, sur le quai duquel l'importateur French Boat Market possède ses bureaux. Un petit coup de propulseur d'étrave facilite encore la manœuvre. Tandis qu'on double la petite jetée, je fais le point sur la position de pilotage. Debout, en appui fessier sur l'arrondi du siège biplace on est vraiment bien. Par contre, assis, les commandes sont un peu basses, et l'absence de cale-pieds problématique. Le pare-brise est bas, traité en saute-vent, mais va s'avérer efficace lorsque nous ferons nos mesures de vitesse. La limite des 300 m est maintenant derrière nous ; nous en profitons pour réveiller la bête. Il n'y a pas à dire, les deux gros V8 Yam poussent furieusement ! Et jusqu'à la vitesse maxi que nous relèverons à… 48,3 nœuds. En comparant les chronos de déjaugeage et de 0 à 20 nds, on s'aperçoit que le second est meilleur que le premier. Il est vrai que pour sa dimension, le Prince 35 cabre sensiblement au démarrage, ce qui occasionne une perte de visibilité vers l'avant un peu gênante pour le pilote. Toutefois, le chantier a monté des flaps hydrauliques afin de "baisser le nez" du bateau lorsqu'il déjauge ou navigue à faible allure planante où il montre une certaine propension à marsouiner. Ces derniers sont efficaces, mais posent la question de cette motorisation… Il est vrai que les V8 sont particulièrement lourds, surtout en position reculée sur leur brackett, en débord de la flottaison. De surcroît, ces moteurs n'étaient pas disponibles avec embase XL, et ce sont des XXL qui ont été montés… Reste qu'à notre humble avis, partagé d'ailleurs par les responsables de la marque, une paire de Yamaha V6 300 chevaux serait bénéfique pour la neutralité de l'assiette du bateau (225 kg de moins en porte-à-faux !). Et les performances, ne devraient pas trop en souffrir, notamment dans le domaine du rendement.
Pour le reste, rien à redire sur les qualités dynamiques de ce prince des mers. Docile, précis, très évolutif malgré son poids, il transmet de bonnes sensations à son pilote. Virant dans un mouchoir de poche, sans ventiler en sortie, avec une gîte intérieure modérée, il s'avère parfaitement sain. A défaut de vagues, quelques croisements de sillages de vedettes de passage nous ont laissé une belle impression quant à la souplesse de la carène.
CONCLUSION
Plus "sexy" que le son frère aîné, le Prince 34 dont l'étrave un brin caricaturale défit les codes esthétiques, le Prince 35 SC apparaît comme une incontestable réussite. Rapide, confortable (un régal à 4 500 tr/min et 31 nœuds !), raffiné et fonctionnel, il est capable d'endosser avec succès les deux costumes que ses utilisateurs voudront le voir endosser : celui du bateau de croisière familiale (bien l'option de la seconde cabine !) et celui du bateau de jour XXL.