Elégance et cohérence caractérisent l'ambitieuse série des Prince, dont nous vous présentons ici 5 des 12 modèles. Du 21 au 28-pieds, nos essais ont été, à quelques nuances près, suffisamment convaincants pour comprendre la bonne réputation dont jouit le chantier milanais. Et des représentants de cette gamme prestigieuse qui est en train de damer le pion à son initiatrice, celle des King. Alors, les princes, plus forts que les rois ? Crime de lèse-majesté en vue !
Texte Philippe Leblond – Photos Jérôme Kelagopian pour French Boat Market, Philippe Leblond.
Avec l'arrivée des dernières nouveautés, les Prince 23 SC et 35 SC, la série haut de gamme du constructeur milanais compte désormais 12 modèles, du "petit" 21 (6,20 m) jusqu'au monumental 43 Luxury Cabin (12,90 m). Si vous y ajoutez les séries King (six modèles) et King RS (six modèles), sans oublier les lignes d'entrée de gamme Freedom (trois modèles) et Winner (trois modèles), vous êtes en présence de l'une des productions de semi-rigides, à programme familial, les plus larges du marché. En effet, Nuova Jolly a fait de ce segment son "cœur de cible". Vous ne trouverez pas de versions utilitaires, pour plongeurs ou pêcheurs, parmi ces gammes.
D'un programme à la journée, il est également possible de l'étendre à la croisière, grâce à certains modèles dotés d'une cabine. C'est le cas avec les Prince 27, 28, 34, 35 et 43 pieds qui disposent tous d'une vraie cabine offrant deux couchages, voire quatre pour le 35 SC et le 43, ainsi que de sanitaires permettant de prolonger son séjour à bord, à distance des marinas. Mais, la nouveauté marquante, c'est le lancement d'un day-cruiser de moins de sept mètres, le Prince 23 Sport Cabin, qui vient concurrencer le seul semi-rigide de ce type présent sur notre marché : le Zodiac N-Zo 700. Dérivé du Prince 28 SC, il est intéressant à plus d'un titre, comme nous allons le voir plus loin…
Nuova Jolly a su s'inscrire parmi les marques de standing supérieur, au sein d'une concurrence italienne particulièrement relevée. La construction, particulièrement sérieuse (polyester armé de fibres de verre multiaxiale posées manuellement, tubes assemblés avec du tissu Orca 1 670 décitex, selleries et inox de qualité), associée à un dessin élégant (très marqué "edge design"), a rapidement fait la réputation de cette marque qui a connu un fort développement depuis une quinzaine d'années. Nous avons pu tester une partie de la gamme Prince dans le fief de son importateur, au départ du port de La Rague (baie de Mandelieu). Voici, dans ce numéro, les Prince 21, 23, 23 SC, 25 L et 28 WA. Nous publierons ultérieurement un "match" entre le 35 SC et le tout nouveau 35 CC, dévoilé au dernier Salon de Paris.
Conclusion :
Au cours de cet essai de groupe, ces cinq Prince, bien que de dimensions et puissances différentes, ont tous démontré un comportement nautique satisfaisant. Présentés par Teo Aiello, comme moins rapides mais plus marins que les modèles de la série King, les Prince sont, il est vrai, dotés d'une carène au V plus prononcé (de 25 à 55° contre 20 à 45° pour les King). "Cela explique que les King sont plus performants à puissance égale, ou permettent d'opter pour une puissance inférieure tout en assurant des vitesses équivalentes. Mais, les Prince ont un tempérament plus marin" compare Teo Aiello. Difficile pour nous de valider ce discours, n'ayant pu faire la comparaison directe avec les King. Mais, quoi qu'il en soit, les Prince assurent à la fois un bon passage dans la houle et des vitesses tout à fait dans le coup. Leur qualité de présentation et la maîtrise de leur plan de pont sont aussi des arguments qui font mouche. En regard de quoi, les petits inconvénients relevés lors de ces essais restent acceptables.
Au ponton :
Déjà sept ans ! Et le Prince 28 WA les porte plutôt bien. Il était parmi les premiers modèles à recevoir des modules en polyester (hiloires de cockpit, arceau, poste de pilotage, delphinière) à arrêtes vives, un design toujours en vigueur sur les derniers semi-rigides du chantier milanais, et de bien d'autres marques. L'agencement de son cockpit aussi n'a pas pris une ride, si ce n'est qu'il n'apporte pas grand chose en plus comparé à celui du 25, auquel il rend tout de même un mètre… La différence la plus notable, c'est l'extrémité arrière de la carène, avec un tableau moteur rejeté à l'extrémité des cônes de flotteurs, une "rallonge" mise à profit pour une spacieuse plate-forme arrière, couverte de teck véritable, comme tout le pont d'ailleurs (de série SVP !), et une longueur à la flottaison record. Par contre, comme sur le 25, le carré est plus petit que sur les deux Prince 23 en raison d'une banquette au dessin perfectible. On peut y tenir à quatre, maximum. Le leaning-post de notre modèle d'essai était équipé d'une plaque de cuisson, d'un évier et d'un frigo (options). A ce sujet, difficile de ne pas saluer l'effort consenti par Nuova Jolly pour ce qui est de la dotation standard, avec entre autres : guindeau électrique, plancher en teck, extension de plate-forme de bain, arceau polyester armé de feux de navigation, gonfleur électrique, rallonge de solarium avant, pied de table pour la dînette, WC électrique, douchette avec réservoir de 65 litres…
Il est à signaler que depuis le lancement du Prince 28, le tableau de bord a été redessiné, avec un espace plus important au centre, permettant d'accueillir sans encombre un combiné GPS-sondeur à grand écran et d'autres aides électroniques à la navigation, ainsi qu'une sono. Par contre, on peut regretter que, parvenu à cette taille, le poste de pilotage soit toujours un faux biplace, identique ou presque à celui de ses petits frères de gamme. Il est vrai que malgré ses 8,80 m de longueur, la largeur du Prince 28 Walkaround (pont de plain-pied tout autour de la console/abri) est inférieure à celle du 25 et seulement égale à celle des 23.
En navigation :
Quel punch ! Nos chronos d'accélérations parlent d'eux-mêmes avec 2"6 pour déjauger et 3"7 pour passer de 0 à 20 nœuds. Ces chiffres sont parmi les tous meilleurs jamais enregistrés par nos essayeurs. C'est la résultante de la double motorisation qui, en général, à puissance égale, délivre une poussée supérieure à celle d'un moteur unique. Il est vrai que concernant ce 28-pieds, la puissance maxi outrepasse de 100 ch celle du plus gros hors-bord (si l'on excepte l'extravagant Seven, V8 américain de 557 ch)… Mais, à la lumière des performances obtenues (près de 45 nœuds de V-max et 24 à 33 nœuds aux régimes de croisière), il n'est pas impossible qu'un 350 ch (Mercury ou Yamaha) puisse suffire à lui donner assez de dynamisme. Citons, pour exemple, les 41,3 nds obtenus avec deux Suzuki 150 ch lors de notre essai de 2007 (Pneu Mag n°67). Une performance plus que décente, avec "seulement" 300 ch. Pour en terminer avec les chiffres, difficile de passer sous silence le manque d'autonomie (118 milles seulement au meilleur rendement) en raison d'un réservoir sous dimensionné (le même que sur le Prince 23 dont la puissance maxi est fixée à 250 ch !). Le 28 manque clairement de capacité en carburant. 100, voire 200 litres supplémentaires s'imposent si l'on opte pour 2 x 225 ch.
Bien installé derrière le tableau de bord revêtu de simili carbone, lorsqu'on est assis, avec l'aide du repose-pieds repliable (par contre debout, les barreurs de grande taille trouveront l'espace insuffisant entre le siège et la console), on prend un réel plaisir à lâcher toute la cavalerie. La poussée est vertigineuse, et ce jusqu'au régime maxi. Malgré le poids des deux V6 positionnés très en arrière, l'assiette est bien équilibrée, en longitudinal comme en latéral. En dépit des commandes à câbles un peu fermes, difficile de ne pas attaquer face à la houle, que ne craint pas cette longue carène, même si elle passe un peu moins en finesse que celle du 23. Et en virage, le 28 se montre impressionnant d'accroche, d'aisance et de précision. Attention toutefois en sortie, car en l'absence de cavitation, les chevaux sont bien 450 à la relance !