Bien qu'encore peu courant, le choix entre une version hors-bord ou in-board d'un même modèle de semi-rigide se fait moins rare. C'est le cas chez Revenger, fameux constructeur anglais, qui propose deux 29 pieds aux qualités nautiques hors du commun. Et en plus ils sont beaux ! Reste à choisir le type de motorisation : hors-bord ou in-board ?
Texte et photos Philippe Leblond
Le Revenger 29 se positionne dans le haut de la production de ce manufacturier situé à l'ouest de Londres, renommé pour ses bateaux sportifs, dominé par un impressionnant 34 pieds (10,50 m), et dont pas moins de cinq modèles (du 23 au 34) sont proposés à la fois en version hors-bord et in-board ! Le comportement des deux bateaux, fortement dicté par la forme radicale de leur carène, est assez voisin. Mais bien sûr, les deux types de motorisations donnent, logiquement, lieu à quelques nuances d'interprétation. Au-delà des propriétés dynamiques de chacun, où la différence de puissance joue aussi un rôle, le plan de pont offre deux agencements distincts, inhérents aux implantations mécaniques. Le niveau de construction et de finition des semi-rigides Anglais, malgré une apparence souvent moins sophistiquée que celle de leurs concurrents italiens, n'en est pas moins remarquable… Et notamment chez Revenger qui maîtrise parfaitement la stratification, avec des coques soumises à des vitesses souvent supérieures à 50 nœuds, et des flotteurs longilignes aux assemblages impeccables. Les tubes du 29 pieds, de diamètre progressifs, sont réalisés en Néoprène/Hypalon et comportent sept compartiments de gonflage étanches (équipés de valves de surpression), ce qui leur donne, au-delà de la sécurité, une rigidité appréciable pour faire face aux contraintes mécaniques imposées par des vitesses aussi importantes. Le réservoir de 272 litres (même contenance pour les hors-bord et in-board) est en inox. Le circuit de carburant et les câbles de commandes sont tous acheminés sous le plancher en contreplaqué marine stratifié, doté d'un antidérapant efficace sur la version hors-bord, et recouvert de teck massif (pont avant et plate-forme de bain seulement) sur la version in-board. Une option facturée environ 4 500 €… Le cockpit, autovideur, s'il comporte une partie de ses aménagements moulés (pont avant et socle de la banquette arrière) est aménagé avec une console et un siège rapportés, solidement fixés au plancher. La qualité perçue est excellente, grâce à une finition soignée en tous points. La différence essentielle, entre la version hors-bord et la version in-board, se situe naturellement du côté de la proue. La première est dotée d'un profond bac moteur, encadré par deux plates-formes de bain situées directement derrière la banquette, avec laquelle elles sont moulées d'un seul bloc. La seconde met à profit la surface du capot moteur pour proposer un solarium de bonne dimension. En fait, pour intégrer ce bain de soleil, la banquette du 29 IB, dont le dossier sert de repose-tête, est plus placée plus en avant dans le cockpit, et les flotteurs ont été légèrement rallongés (20 cm). Le poste de pilotage, avec une belle banquette biplace pour le pilote et le copilote, ainsi qu’une volumineuse console pourvue d’un siège pour deux, moulé sur sa face avant, est strictement le même sur les deux semi-rigides. Par contre, on note un pont avant différent, celui de l’in-board étant surélevé sur une bonne longueur, avec deux capots de pont transparents (coffre + baille à mouillage), tandis que celui du hors-bord se contente d’un simple puits de mouillage avec capot plein. Chacune des proues est dotée d’une bitte d’amarrage inox, mais dépourvue de delphinière. On trouve un simple guide de mouillage sur le 29 IB. Mais, il convient de rappeler que, comme souvent avec les semi-rigides Britanniques, la philosophie est de laisser une grande liberté au propriétaire pour aménager son bateau comme il le souhaite. De ce fait, la liste des options est assez fournie : plusieurs types de consoles et de sièges (jockey notamment), réservoir de carburant additionnel (jusqu’à 340 l), mains-courantes et cadènes supplémentaires, nombreux tauds… Reste à décider jusqu’à quelle hauteur doit se monter l’addition ! C’est, à n’en pas douter, le point fort des Revenger. Précisons tout de suite que le plan d’eau calme ne nous a pas permis de juger des qualités de passage dans la vague de ces deux bateaux. Nous avons dû recourir à la « chasse aux sillages » pour ressentir un peu le niveau de confort et d’équilibre des carènes, et nous avons exploité au maximum celui d’un Princess 350, que nous avons suivi un bon moment. Inutile de vous dire que le Revenger 29 IB s’est joué de cette double ondulation de 70 cm ! Tout juste a-t-il un peu décollé, et l’on a pu apprécier le mordant de la carène et sa reprise de contact parfaitement sereine à la réception. Que ce soit de face, de trois-quarts, avec ou sans trim… Même pas mal ! Dommage, en effet, de ne pas avoir bénéficié d’un bon mètre de houle, pour réellement prendre la mesure du potentiel de cette longue et étroite carène à double redan, dont le V est prononcé jusqu’au tableau arrière. Il suffit de regarder le rapport longueur/largeur (3,6) : c’est celui d’un offshore de compétition de même longueur ! Nous avons particulièrement apprécié le comportement parfait de la version HB, sous-motorisée, il est vrai. Aisance dans la glisse, assiette parfaite, absence de roulis, même avec un trim complètement positif, confort « velours » dans le clapot (30 cm), docilité, capacité à virer à fond et court sans ventiler et avec une précision diabolique, feeling de barre exceptionnel… Bref, un régal ! Tous ces points positifs, on les retrouve aux commandes du 29 IB, avec une sensation de vitesse supérieure (65 ch et 11 nds de plus). Seul bémol, une petite chaleur que nous nous sommes faite lors d'un virage à droite pris à 50 nœuds. Comme d'habitude, le Revenger s'est mis à gîter progressivement sur l'intérieur, puis s'est redressé d'un coup pour partir en légère contre-gîte. Grâce à un bon réflexe de maintien, nous avons pu rester à bord, mais bon… ça surprend ! Un problème que nous n'avons pas rencontré lors des virages à gauche. Peut-être une conséquence de l'effet de couple, et d'un mauvais réglage de trim de ma part (un peu trop rentré à l'attaque du virage ?). Pour le reste, on ne peut être qu'admiratif devant l'aisance phénoménale de cet ensemble (Revenger/Yanmar) qui croise sans effort apparent à 45 nds et 3 500 tr/mn. Un tandem sur mesure pour les « bouffeurs de milles »… Une chose est certaine, malgré toutes ses qualités, le Suzuki 250 ch est un peu « court » pour donner pleinement vie au Revenger 29 HB, un semi-rigide dont le tempérament sportif est unanimement reconnu, grâce à une carène en V profond particulièrement affûtée. Bien sûr, à la lecture de nos mesures, on note tout de même 41,6 nds en pointe et 32,3 en croisière à 4 500 tr/mn… Des valeurs dont pourraient se contenter la plupart des semi-rigides. Mais, pas le Revenger HB qui, à ce rythme, est franchement sous-exploité, et ne dispense pas les sensations de vitesse qu'on attend de lui. Sur un semi-rigide au tel potentiel, le recours à la bi motorisation s'impose, et 2 x 175 ch nous semble être le « minimum syndical ». Compte tenu de l'identité du bateau, on verrait bien deux 200 ch deux-temps à injection directe (Evinrude E-tech, Yamaha HPDI ou Mercury Optimax), ou à défaut, deux Mercury 200 ch Verado, des quatre-temps à compresseur, dont le brio se rapproche des deux-temps. Avec un tel attelage, les 50 nds sont facilement à sa portée ! Et pourquoi ne pas opter pour la puissance maxi (2 x 225 ch), qui nous semble facilement acceptable par une carène de cette trempe ? Sans compter avec un chrono de déjaugeage qui serait nettement plus flatteur que les 4''9 réalisées avec le Suzuki… S'il est une autre certitude, c'est que le Yanmar 315 ch est tout à fait à même de mettre en valeur le Revenger 29 IB. Nos résultats le prouvent : 52,5 nds en pointe, 45 nds en croisière à 3 500 tr/mn, seulement 1 900 tr/mn pour hydroplaner (15 nds)… Il n'y a que le déjaugeage qui avec 12 secondes fait triste mine. Mais, c'est la rançon d'une propulsion diesel, le temps de réponse à l'accélération et le délai de déclenchement des turbos, font que c'est inévitable. Une embase Bravo Three à double hélice (le Yanmar de l'essai était équipé d'une Bravo One) associée à la boîte deux rapports ZF permettrait une sensible amélioration, mais là, c'est un autre budget !.
CONCLUSION
Sur le plan de la navigation et des performances, la motorisation hors-bord (à condition de mettre les chevaux) et la propulsion diesel donnent entière satisfaction, la carène du Revenger 29 étant un « avion de chasse ». Dans le cadre d’une utilisation purement sportive, ce qui colle bien à l’identité de ce semi-rigide, notre préférence ira à un montage bi en hors-bord. Question de feeling et de réponse moteur, le diesel n’étant pas ce que l’on fait de mieux sur le plan des sensations de pilotage. Par contre pour de longues traversées à allure soutenue -la classification B l’y autorise - la motorisation in-board diesel possède une allonge remarquable et un couple de « camion » qui s’accommode parfaitement des navigations avec un équipage nombreux et son chargement. Sur le plan du budget, la différence de prix entre hors-bord et diesel serait faible si l’on compte avec deux hord-bord, et nous ne retiendrons pas ce critère au moment du choix. Reste, le plan de pont, plus agréable en configuration in-board avec un beau solarium et une agréable plate-forme de bain… Choix cornélien !