Avec le S530, Sacs démontre qu'il est aussi habile à produire un petit pneu familial de belle facture qu'à livrer un de ces super ribs au look débridé qui jalonnent les chemins de sa gloire. Ce semi-rigide, ludique et confortable, a tout pour séduire. A regarder de près !
Texte et photos Jacques Anglès
Quel est le point commun entre le dernier opus du chantier milanais, le Strider Zeta R (18 m, 2 400 ch et transmissions Arneson à hélices de surface !) et le S 530 de cet essai ? Réponse : l'expérience. En effet, bien que son image de marque soit surtout associée au luxe et au design audacieux de ses grands modèles (Top Class et Individual Class, totalisant huit bateaux de 8,40 m à 18 m), Sacs démontre le même savoir-faire sur les semi-rigides plus "raisonnables" de sa gamme Sport Class (4,80 m à 8,40 m), de conception relativement classique ainsi que l'illustre le S 530, pas tout à fait son plus petit modèle mais presque.
La qualité de réalisation se voit au premier regard, à une foule de détails : brillant du gel-coat, sellerie sophistiquée, collages impeccables du flotteur, accastillage robuste, etc. Et, sous la simplicité apparente, la "patte" de Sacs en matière de design est bien présente quand on y regarde de plus près. Voyez par exemple la remarquable modularité du cockpit. Chaque zone (avant ou arrière) peut prendre trois configurations : navigation (cinq places assises dans le sens de la marche), salon/repas et farniente avec deux bains de soleil de bonnes dimensions, ce qui est rare sur un bateau de cette taille. De plus, tous les éléments amovibles (allonges de solarium et table, inclus dans l'équipement standard) sont faciles à installer et trouvent facilement place dans les coffres. Ces derniers, nombreux et assez volumineux pour ranger sans problème tout le matériel de bord, méritent aussi une bonne note, avec mention spéciale pour la soute arrière, dotée d'une cloison entre les éléments techniques disposés sous le pont arrière (batteries, filtres, etc) et le volume de rangement sec, placé juste sous le capot. Bonne note également pour la circulation d'un bout à l'autre du cockpit, très facile grâce au large passavant que ménage la console décentrée sur tribord, mais on peut pas en dire autant de l'accès à l'échelle de bain, peu pratique (un peu mieux en rabattant le dossier de la banquette arrière).
De nombreux détails signalent aussi l'aspect fonctionnel du design, par exemple les fermoirs de coffre montés dans des réserves en creux, la commande de gaz encastrée dans un logement ad hoc de l'hiloire tribord ou les casiers pour caler de petits objets personnels sur la console de pilotage. L'ensemble se distingue en outre par sa finition chic, à l'instar des selleries surpiquées, de la porte en teck du coffre sous le volant sport, celui-ci étant gainé de cuir, ou de l'accastillage inox (voir la robuste main-courante de console ou la belle facture de l'arceau arrière rabattable). Dans ce tableau globalement réussi, on relève pourtant des détails qui "clochent", certains faciles à corriger, d'autres moins. Il manque notamment des vérins de retenue sur tous les capots de coffres, le couvercle de puits à chaîne ne dispose pas de passage pour la ligne de mouillage et le cloisonnement du dessus de console laisse peu de latitude pour agencer le tableau de bord et installer un GPS-sondeur. Plus gênant et difficile à améliorer, le siège de pilotage s'avère trop étroit (37 cm) et pas en face du volant. Malgré ce défaut, le bilan statique du S 530 reste très positif, les trois fondamentaux étant respectés : confort du cockpit, circulation et rangements. Encore faut-il que le bilan dynamique soit au diapason… Quelques observations avant de mettre le contact. Premier point, le tube de fort diamètre (qui confère à la silhouette une stature puissante) repose franchement sur l'eau à l'arrêt, assurant une excellente stabilité (mais qu'en est-il en navigation ?). Second point, sous le flotteur, la carène montre une étrave fine et un V profond qui devrait favoriser le confort dans les vagues, avec quatre virures assez proéminentes pour la stabilité de route et l'accroche en virage. Troisième point, le moteur de 80 ch monté pour cet essai, avec 35 ch de moins que la puissance maxi autorisée, paraît plus que sage. Quatrième point, une visite des fonds montre une structure interne d'apparence robuste. Voyons ce que cela donne sur l'eau ! Manette dans le coin, le 80 ch Mercury assure un déjaugeage rapide (moins de quatre secondes), la carène passant par une phase cabrée, normale pour un semi-rigide de cette longueur, avant de reprendre son assiette. Dans la configuration "light" de l'essai (deux personnes à bord et pas de poids sur l'avant), l'étrave reste assez légère, sans toutefois que la stabilité longitudinale s'en ressente. Compte tenu de la faible puissance installée au tableau arrière, les chronos de déjaugeage et d'accélération sont plus que satisfaisants, tout comme les vitesses de croisière enregistrées aux régimes de meilleur rendement (18 à 24 noeuds entre 3 600 tr/min et 4 400 tr/min). Jusqu'aux vitesses maxi, le S 530 fait preuve d'une tenue de cap et d'une stabilité latérale sans reproche, et sa carène en V profond s'avère assez confortable dans les vagues, malgré quelques coups de raquette sous les flotteurs, notamment par mer de travers. La tenue en virages, longs ou serrés (avec gîte prononcée), s'avère elle aussi excellente. Le pilotage est vif, avec des trajectoires précises et une réactivité au trim qui permet, en ligne droite, de bien aérer la carène et de gagner plusieurs nœuds à pleins gaz. Mais ne forcez pas sur ce réglage sous peine de déclencher l'instabilité (ceci ne se produira pas avec le bateau normalement chargé). Si la vitesse maxi obtenue avec le 80 ch convient à un programme familial, cette puissance reste un peu juste à nos yeux pour exploiter tout le potentiel de cette bonne carène. Pas plus lourd, le Mercury F100 pourrait être un choix parfait.
Conclusion : Qualité haut de gamme et finition chic distinguent ce familial aussi séduisant par son confort que par son comportement marin. Fort bien agencé, son cockpit affiche sa vocation méditerranéenne, avec deux bains de soleil qui lui donnent un net avantage dans sa catégorie, et l'on apprécie tout autant son confort en navigation, et ses rangements généreux. Très plaisant à piloter, il peut se suffire du Mercury F80 à conditions de ne pas le surcharger, mais un 100-chevaux permettra sans aucun doute de mieux apprécier ses qualités dynamiques.