Petit frère du Sea Hawk 285, le deuxième semi-rigide du constructeur breton Kelt hérite du même patrimoine génétique : proue typique à tonture inversée, franc-bord généreux, flotteur de fort diamètre, cockpit modulaire… Bon sang ne saurait mentir : dans la mer formée comme en eau calme, ce costaud a du répondant.
Texte et photos Jacques Anglès
Avec ce second modèle Sea Hawk, c'est une lignée qui prend forme, et l'on peut louer le talent des designers Kelt qui ont su inventer un look inédit, ce qui n'a rien d'évident dans le monde du pneumatique, entre des Italiens toujours inventifs et des Français plus conformistes. à l'instar de son grand frère, le «petit» Sea Hawk se reconnaît donc de loin, grâce à sa proue caractéristique qui est la signature du style Kelt (cf. les White Shark). La hauteur et la forme tulipée de cette proue délivrent d'emblée un message subliminal : pas de risque d'enfourner avec un avant aussi bien défendu ! Tout en cultivant sa carrure de pro, ce modèle affiche une élégance incontestable, qu'il doit notamment à une finition soignée et à une foule de détails chics et de bon goût, à l'exemple des parements de teck sur le pontage avant et les plats-bords arrière, des beaux taquets escamotables ou des selleries couleur coquille d'œuf. La qualité du polyester, qui fait la fierté du chantier, concourt également à cette bonne impression : le gel-coat présente un brillant impeccable et l'on ne décèle aucune flexion quand on saute dans le cockpit ou sur les capots de coffre. Le chantier utilise d'ailleurs la fabrication par injection pour la console et certaines pièces de pont, ce qui assure une finition gel-coatée aussi nette à l'intérieur qu'à l'extérieur. Les fonds sont, quant à eux, soigneusement renforcés par un carlingage serré de varangues et de cloisons longitudinales intégralement stratifiées. Le flotteur de fort diamètre, réalisé en CR/CSM 1 500 deniers, collé au néoprène, possède six compartiments, avec des extrémités arrière hémisphériques. Le pourtour est intégralement protégé par un double liston de forte épaisseur et pourvu de 6 grosses poignées en forme de taquets d'amarrage. Des mains courantes en Nylon, pratiques et douces au toucher, bordent toute la moitié avant du bateau. Le cockpit, d’une largeur peu commune (1,90 m), reprend le même concept que le 285 : priorité à l’espace et à la flexibilité, avec une grande banquette arrière (quatre places) dépliable en bain de soleil, juste fixée au plancher par des sangles. Légère et démontable en un clin d’œil, elle est facile à débarquer si l’on veut dégager de la place pour la pêche ou la plongée. La proue est dotée d’une banquette en U, convertible, soit en bain de soleil, soit en coin-repas convivial, l’extension du bain de soleil se transformant de table grâce à un pied amovible. Dommage que cet équipement soit en option… Le caractère sportif s’affirme dans le poste de pilotage doté d’un leaning-post, donc pilotage debout obligatoire (c’est ce qu’il y a de mieux). La console, héritée du White Shark 225, est assez volumineuse pour abriter un WC (chimique ou marin, en option), élément de confort toujours apprécié des dames. En outre, ce volume sert de rangement quand on rentre au port. Points forts de ce cockpit : la facilité de circulation, la hauteur de «franc-bord», supérieure à la plupart des pneus (c’est rassurant avec des enfants à bord), la facilité d’adaptation à des programmes divers (balade, pêche, plongée), le local sous console, la position de pilotage. Mais on relève aussi des points faibles. Le plus critiquable est le montage complexe du mouillage avec écubier d’étrave, pratiquement inutilisable sans guindeau électrique, celui-ci étant en option. On note également l’accès compliqué à la baille à mouillage, la nécessité de déplacer la banquette arrière pour ouvrir la soute ou l’accès peu commode à l’échelle de bain, elle-même très étroite. Heureusement, le Sea Hawk 224 fait oublier ces travers par son tempérament marin affirmé. Notons au passage qu'il reprend la carène éprouvée du White Shark 225, à peine modifiée (méplat de fond) pour tenir compte du poids inférieur du Sea Hawk. Cette carène présente un V relativement modéré à l'arrière, s'accentuant vers la proue, avec une étrave très « passante » et quatre longues virures et un étroit contre-bouchain inversé. Tout d'abord, on apprécie la position de pilotage debout, en appui sur le leaning-post, avec le volant «à l'américaine» (à grand diamètre et assez horizontal) et la commande de gaz bien placée à la main droite. Bien servi par un Evinrude 250 E-Tec nerveux, le Sea Hawk fait preuve d'un sacré punch. Précisons que c'est la puissance maximale autorisée et que ce bateau se contentera sans perdre son caractère d'une bonne cinquantaine de chevaux en moins. Le déjaugeage est vif, avec un cabré peu marqué, une reprise d'assiette rapide et une bonne sensibilité au trim quand on monte dans les tours. Avec le 250 E-Tec, on obtient une super vitesse de croisière : 26 à 31 nœuds au régime optimal du moteur (3 600-4 000 tr/mn.). L'assiette est légèrement positive, la carène bien dégagée jusqu'à mi-longueur. La stabilité est bonne tant en longitudinal qu'en latéral et ne se dément pas à haute vitesse, avec un run maxi enregistré à 46,2 nœuds, résultat flatteur pour un bateau qui ne se classe pas dans les poids plume. Seule réserve, nous avons noté, par moments, une tendance à s'appuyer légèrement du côté du vent par vent de travers, dans les vitesses moyennes (19-22 nds). En virage, l'accroche est difficile à prendre en défaut, mais l'hélice se met en ventilation assez facilement lorsqu'on raccourcit le rayon de giration (précisons tout de même que le moteur de l'essai était monté assez haut, ce qui favorise ce phénomène). Mais, c'est dans la mer formée que le Sea Hawk dévoile son tempérament de baroudeur. Par force 6, entre le Golfe du Morbihan et La Trinité, nous couvrirons une dizaine de milles en toute sérénité, en maintenant des vitesses de 17 à 25 nœuds dans une mer très hachée, ceci sans prendre d'embruns au poste de pilotage, avec une direction précise (mais assez ferme) permettant de bien choisir ses trajectoires dans les vagues. Bref, les qualités marines sont bien là. Mais, pour tout dire, on n'était pas très inquiet..
CONCLUSION
Plus qu’un look, c’est un style que Kelt a su créer avec ses Sea Hawk, dont ce deuxième modèle illustre «l’esprit de liberté». Baroudeur sophistiqué, le Sea Hawk 225 est aussi à l’aise pour emporter famille ou amis en balade, où l’on appréciera la convivialité de son cockpit, qu’en sorties tout temps, où l’on aime son comportement sûr et son confort. Relativement lourd pour sa taille c’est la rançon de sa robustesse et de sa largeur, il a besoin de chevaux pour s’exprimer, et se pilote plutôt comme une berline puissante que comme un roadster.