L'AD-55 est l'une des meilleures ventes du chantier espagnol sur le marché français. Pas surprenant car, malgré son apparence banale, ce semi-rigide "fait le métier". Au sens marin, il ajoute le sens pratique, avec des recettes toutes simples mais qui fonctionnent. Démonstration.
Texte et photos Philippe Leblond
Compact, léger, facile à transporter et à mettre à l'eau, l'AD-55 devrait convenir aux utilisateurs intensifs. Cela tombe bien puisqu'il s'adresse à eux, avec un plan de pont qui ne s'embarrasse pas d'artifices de séduction. Voilà qui plaît aux plongeurs, chasseurs et autres pêcheurs qui apprécient ce genre de semi-rigide, doté d'un plancher de plain-pied, bien dégagé autour du poste de pilotage. Bref, un "châssis" à équiper à la carte, tarifé à 7 912 € sans poste de pilotage et sans moteur (16 790 € avec le moteur de l'essai et la console, 17 845 € avec la remorque, le leaning-post étant facturé en sus à 795 €).
L'AD-55 possède, comme tous les Tarpon, des flotteurs PVC de Melher Texnologies, dotés de valves de surpression, de renforts d'assises antidérapants, de passages plongeurs et de saisines en cordelette, ainsi que d'un taquet coinceur et d'un guide de mouillage en caoutchouc (pas assez profond). La partie polyester comporte une coque remplie de mousse d'insubmersibilité (bien aussi pour l'atténuation phonique des impacts), fermée par un pont en bois stratifié sur les deux faces et enduit d'un antidérapant "au rouleau". Le tableau arrière est percé de deux gros nables de vidange avec manchons de PVC relevables, et la carène, qui forme un angle de 22° au tableau arrière, voit son patin de quille protégé par un talon en inox. Ce dernier est le bienvenu pour atténuer le ragage sur les cales de mise à l'eau ! Le pont de notre bateau d'essai comportait une console de pilotage, connectée au moteur par les câbles passant sous le plancher, et un leaning-post à monture inox avec cinq porte-cannes. Concernant le rangement, le Tarpon n'est pas des plus généreux : un coffre pour le mouillage intégré au pont, un compartiment dans la console déjà occupée par la batterie, et un grand vide-poches sous l'assise de pilotage… Pierre, le patron de Saint-Vaast Marine, chez qui se sont déroulés les essais, insiste sur la qualité des accessoires retenus : "Une batterie Vetus, un filtre essence Raccor – le seul qui résiste à l'éthanol – et une direction Lecomble & Schmitt…" Terminons les présentations par l'aspect cosmétique, en précisant que l'AD-55 est proposé, au choix, avec un gel-coat (pont et coque) blanc, gris clair ou anthracite, et des tubes gris, bleu clair ou foncé, ou jaune…
Le moment est venu de laisser la parole au Mercury 60 ch, un 4-temps à injection électronique. Bien installé aux commandes (un bon point pour le boîtier pupitre) je pousse les gaz sans plus tarder. L'accélération est vive, confirmée par des chronos satisfaisants grâce à un cabré modéré lors du déjaugeage. D'ailleurs, le Tarpon plane dès 3 000 tr/min, ce qui procure une large plage d'utilisation en croisière. Dans ce domaine, nous retiendrons deux valeurs : 16 nds à 3 800 tr/min (régime économique, avec une conso estimée à 4 ou 5 litres/heure) et 23 nds à 4 800 tr/min (croisière rapide). Concernant la vitesse maxi, l'hélice à pas court exigée par le propriétaire de ce Tarpon (il navigue en charge avec quatre passagers et du matériel) a bloqué l'affichage du GPS pile sur 30 nds. De plus, nous nous sommes autolimités à 6 100 tr/min, pour cause de surrégime potentiel. Ce chiffre serait sans doute amélioré avec une hélice à pas plus long… Du point de vue du comportement, l'AD-55 se révèle agréable à piloter, avec une tenue de cap précise, et un bon guidage en virage, même s'il passe un peu trop à plat à notre goût. L'accroche est efficace, mais l'amorce de la ventilation de l'hélice pénalise la relance en sortie de virage. La brise s'étant levée en fin d'essai, nous avons pu apprécier le confort du Tarpon dans un clapot de 60 cm, mais détecter également sa sensibilité à l'effet de couple, qui le fait se réceptionner en penchant sur bâbord. Un peu de trim positif atténue cet effet, mais face à un vent fort, cela risque de poser problème. En conclusion, l'AD-55 fait preuve d'un comportement efficace, et mériterait plus de puissance pour gagner en performance, ce que sa carène au V prononcé devrait très bien supporter.
AU PONTON
La console et le leaning-post étant décalés sur tribord, le passavant se montre généreux et l'espace libre ne manque pas, que ce soit en avant ou en arrière du poste de pilotage. Le leaning-post sur châssis inox est armé de cinq supports de cannes, et d'une main courante précieuse pour les éventuels passagers de l'arrière, qui pourront se tenir debout en navigation. Un équipet souple, situé sous l'assise, permet de ranger les petites affaires au sec. Le bas de la console offre aussi du rangement, tandis que la cale avant sert de baille à mouillage. On apprécie aussi le fait que les câbles soient dissimulés sous le plancher, laissant place nette sur le pont.
EN MER
Avec sa carène qui mesure 22 degrés au tableau arrière et sa coque moussée, le Tarpon AD-55 n'est pas sans arguments pour affronter la mer formée. En fin de journée, la mer s'étant un peu creusée, nous avons pu vérifier son aisance dans le clapot. Toutefois, équipé d'une hélice courte à la demande du propriétaire, sa vitesse de pointe reste un peu en dedans de nos attentes. Une hélice plus longue nous aurait permis de trimer plus généreusement en positif, car nous étions en situation de surrégime… Par ailleurs, on sait qu'une carène en V profond réclame une certaine puissance pour s'exprimer. Un 70 ch (ou un 80 ch) nous semble mieux en phase avec le potentiel du bateau.