Essai Black Fin Elegance 34

Marathonien et sprinter !

Qu'importe le bateau pourvu qu'on ait l'ivresse (de la vitesse) ! Telle pourrait être l'insolente devise de ce grand semi-rigide, capable de filer à 50 nœuds vers des criques lointaines, sans trop se soucier de l'état de la mer. Avec une petite cabine sous la console, au cas où vous auriez l'envie de passer une nuit sous les étoiles !

Texte et photos Jacques Anglès


 155 325 € avec 2 x Mercury 300 ch Verado 4T (tarif 2011)
 10.3 m
 16
 51 nds
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Paru dans le Pneumag n° 85 Septembre/Octobre 2011



Si Black Fin est une marque jeune, avec tout juste trois ans d'existence, plus personne n'ignore qu'il s'agit en fait de clones des fameux NuovaJolly, fabriqués par le chantier italien pour Brunswick Marine (Mercury) et destinés à la vente en packages haut de gamme par le réseau Mercury-Mariner. Sous un habillage (à peine) différent, les Black Fin bénéficient donc de l'expérience et de la qualité de fabrication attachées à la marque milanaise. En l'occurrence, le Black Fin Elegance 34, jumeau du NuovaJolly Prince 34 CC, ne s'en distingue que par son habillage noir et blanc au lieu du rouge et blanc habituel du chantier et par la motorisation Mercury. Avec son immense cockpit ouvert, cette unité de prestige se dédie à la balade rapide et au farniente dans les criques, de préférence en équipage pas trop nombreux pour profiter au maximum de son aménagement luxueux, tout en ayant la possibilité d'embarquer seize passagers à l'occasion. Côté fabrication, on reconnaît la qualité NuovaJolly sur le tube, en tissu Orca (néoprène-Hypalon 1670 dtx de Pennel & Flipo) et sur le polyester, avec un gel-coat à base de résines isophtaliques, mis en œuvre sur une structure de coque généreusement renforcée. L'étrave remontante “en babouche“ (typique des NuovaJolly), la largeur hors normes et le fort diamètre du tube (68 cm !) renforcent la sensation de puissance qui se dégage de ce bateau. Ce gros flotteur a un autre atout : il rehausse le franc-bord et contribue donc à la sécurité du cockpit, notamment avec des enfants à bord, ou par gros temps.
C'est le cas pour cet essai hivernal sur fond de Pyrénées enneigées, avec une tramontane nerveuse qui lève une mer courte et “cassante“ sur le Golfe du Lion. Les deux 300 ch Verado étant en train de chauffer dans un ronronnement à peine audible, nous en profitons pour gagner le large avant de poursuivre la revue de détail ! À plus de 40 nœuds dans la mer formée, la stabilité et la sensation de totale sécurité que délivre cette carène puissante me font vite oublier la froide morsure du vent. Bien servi par le punch des 300 ch Verado et par sa direction précise, le Black Fin 34 se pilote au doigt et à l'œil, en se jouant des vagues. Quelles que soient les figures qu'on lui impose, virages serrés, passages de vagues en tous sens (où l'étrave bien défendue se révèle redoutable), cette coque relativement lourde ne se laisse pas prendre en défaut. Seules réserves, le piédestal de pilotage (nécessaire pour voir par-dessus la haute console) manque de largeur et, comme sur la plupart des grands bateaux, les sensations au volant restent limitées. À 35 nœuds, on a (presque) l'impression d'une promenade de santé, et ceci d'autant plus qu'aucun paquet de mer ne vient mouiller le cockpit. À barouder dans l'écume, je prends la mesure des capacités de l'engin, en enchaînant des séquences au large et des runs à l'abri (relatif) de la côte. Résultat : avec 51 nœuds stabilisés au GPS dans un clapot sévère, l'Elegance 34 entre haut la main dans le club très sélectif des “plus de 50 nœuds“ ! Vu l'état de la mer et l'aéro-frein que constitue le T-Top (une option à laquelle nous préférons un arceau avec bimini repliable), on devrait grappiller deux à trois nœuds de plus dans des conditions normales. En bref, ce marathonien capable d'avaler des milles dans toutes les conditions est aussi un sprinter redoutable. Mais attention à ne pas vous laisser endormir par l'impression de facilité qu'il délivre : piloter entre 40 et 50 nœuds exige une attention sans faille, quelles que soient les conditions et, par gros temps, toute faute de pilotage à haute vitesse est synonyme de danger immédiat.
Après cet essai sportif, nous rentrons au port pour terminer notre “tour du propriétaire". Le pont fait la part belle à un carré arrière qui accueille aisément six à huit convives autour d'une table en teck, pourvue d'un pied télescopique. Elle peut donc s'abaisser, offrant alors un vaste bain de soleil. De là, une échancrure du tableau arrière facilite l'accès à la grande plate-forme de bain, dont l'échelle télescopique encadrée de solides rampes souligne le soin apporté aux détails pratiques. Au centre, le poste de pilotage offre une banquette leaning-post biplace permettant de piloter assis (avec un cale-pied en teck) ou debout, position qui s'avère la plus agréable. Le volant et la commande de gaz sont idéalement placés, mais on aimerait un piédestal de pilotage plus large (il serait possible de gagner 10 cm de chaque côté sans empiéter sur les passavants). La circulation sur le pont est pratique, avec des passavants larges et des mains courantes le long de la console. Autre trouvaille intéressante sur le pont avant, le capot du guindeau traité en escalier de proue, sans oublier les classiques coffres de rangement et un bain de soleil de belle surface. Enfin, le siège devant la console forme un hayon qui s'ouvre sur une cabine abritant un WC (chimique) et deux banquettes pouvant se réunir en un (petit) lit double. Suffisant pour une sieste à l'ombre, mais insuffisant pour qualifier l'Elegance 34 d'unité habitable.



photo Black Fin Elegance 34


photo Black Fin Elegance 34


photo Black Fin Elegance 34


photo Black Fin Elegance 34





CONCLUSION
Vitesse et farniente constituent le programme de prédilection de ce semi-rigide de luxe, qui s'adresse à une clientèle fortunée et soucieuse de confort. Pour des performances d'exception, la motorisation de notre essai est parfaite, mais si vous ne visez pas les 50 nœuds, le package avec 2 x 250 ch sera amplement suffisant. Dommage que la cabine manque de confort, car les qualités marines de cet engin éveillent des désirs de grande croisière.




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