Tout nouveaux, tout beaux, les quatre nouveaux Black Fin qui remplacent l'ancienne gamme nous ont dévoilé leurs talents. Esthétiques, confortables et performants, ils s'adressent en premier lieu à la clientèle méditerranéenne. Mais, compte tenu de leurs qualités marines, ces semi-rigides vendus en packages Mercury/Mariner sont aussi capables de naviguer "fortissimo" dans des eaux moins clémentes.
Texte Philippe Leblond – Photos Philippe Leblond et DR
Depuis l'arrivée sur le marché européen de la gamme Black Fin, il y a six ans, une remarque se faisait récurrente, et à juste titre, comme quoi les semi-rigides estampillés "Black Fin" et vendus à travers le réseau Mercury/Mariner étaient des copies de ceux chez qui ils étaient fabriqués : Nuova Jolly. Une identité commune qui prêtait aussi à confusion, pour le chantier italien, géniteur de la marque originelle. Dorénavant, cette filiation sera moins évidente grâce à la volonté des deux acteurs, et a leur travail commun qui a consisté à remplacer les anciens Black Fin (appellation en pieds) par une nouvelle gamme Elegance, se limitant pour l'heure à quatre modèles à la dénomination métrique : 7, 8, 9 et 10.
Pour Mercury Marine, l'objectif était aussi de clarifier le discours commercial, comme le confirme Corine Maquet (Bruswick Marine Europe), responsable de produit Black Fin et Valiant : "Cette nouvelle gamme de semi-rigides se démarque de celle de Nuova Jolly, grâce à de toutes nouvelles carènes, de nouveaux accessoires de pont et la possibilité d'offrir au client une personnalisation plus poussée avec un choix de coloris pour les flotteurs et les selleries. Pour notre réseau de distribution, le fait de posséder une marque légitime apportera plus de cohérence vis-à-vis du produit. Ce sera plus clair." Pour ce qui est de savoir si un développement de cette nouvelle gamme Elegance est à l'ordre du jour, Corine ne "botte pas en touche", mais calme le jeu : "Nous avons démarré à 7 mètres pour, dans un premier temps, ne pas avoir de chevauchement avec la gamme Valiant qui monte jusqu'à 6,85 m. Cette année, nous allons surtout nous attacher à observer comment réagit la demande face à cette nouvelle ligne de Black Fin. Pour l'instant, les retours du Nautic de Paris et des essais organisés pour les concessionnaires sont très positifs."
Les essais presse se sont déroulés en Corse, au départ du port de l'Amirauté à Ajaccio, avec le concours de Marine Diffusion, le concessionnaire local. Mer belle, avec un restant de houle résiduelle, légère brise de sud-ouest, soleil éclatant, température quasi estivale, bref, des conditions d'essai très favorables pour cerner le potentiel de ces quatre Black Fin, nouvelle génération.
Conclusion :
Mercury Marine a eu raison de vouloir se démarquer de Nuova Jolly, afin de donner un caractère plus légitime à sa marque. D'autant que le savoir-faire du chantier milanais est bien présent sur ces nouveaux Black Fin. Le niveau de qualité perçu est toujours au-dessus de la moyenne, avec un travail du polyester qui ne prête guère le flanc à la critique (gel-coat brillant, pas de traces de démoulage, même au niveau de l'antidérapant pointe diamant), et des flotteurs assemblés avec soin à l'aide d'un tissu Orca, dont les propriétés sont déjà connues, offrant de surcroît un large choix dans les coloris. Pour ne rien gâter, le degré d'équipement, même en standard, est suffisamment poussé pour ne pas avoir à se jeter sur la liste des options. Hormis l'équilibre perfectible de l'Elegance 7 (problème de réglage sans doute), les Black Fin se sont révélés performants et faciles à piloter en dépit des puissances élevées retenues pour ces essais. Enfin, cerise sur le gâteau, il y a aussi l'attrait "prix" de la vente en package.
En navigation :
C'est le sommet de la gamme Black Fin et cela se ressent, à quai comme en navigation. Cette carène à l'étrave altière donne véritablement l'impression de dominer la mer. Et ce n'est pas qu'une impression, car elle a une capacité à s'aérer naturellement.
Il est toutefois nécessaire de donner une bonne dose de trim pour atteindre les 52,7 nœuds ! Une marque de haut niveau, même avec cette motorisation totalisant 600 chevaux, car l'Elegance 10 déplace environ 3,5 tonnes en ordre de marche. Rayon performances, on soulignera également la consommation contenue à 3 000 tr/min, soit à 23,4 nœuds, avec "seulement" 50 litre/heure. Pour une telle cavalerie, c'est vraiment "cadeau". D'autant qu'à cette vitesse (de Calvi, Cannes n'est qu'à 4 h15 min), le confort est digne d'un pullman, les moteurs étant à peine audibles (du poste de pilotage), et l'étrave pulvérisant le clapot avec une aisance insolente. Il n'y a qu'en sortie de virage serré que les 600 chevaux nous apparaissent moins fringants… Une considération un peu secondaire, car ce type de figure est plutôt rare dans le quotidien d'un bateau de ce genre. On pourrait donc envisager 2 x 250 ch, ce qui devrait être suffisant pour atteindre 45 nœuds au régime maxi, quitte à manquer de punch pour s'extraire des virages et au démarrage, car les chiffres obtenus avec 600 chevaux sont déjà modestes (7"3 au déjaugeage, 6"3 de l'arrêt à 20 nœuds).
A défaut de délivrer des sensations de dragster (cf. l'Elegance 9), le grand Black Fin est une "machine" à dévorer les milles en mer ouverte. Et même face à plus d'un mètre de houle, au régime maxi, il reste parfaitement stable et confortable. Nous en voulons pour preuve le fait que les trois passagers assis sur la banquette arrière jouissaient encore d'un confort acceptable, même lorsque les hélices quittaient brièvement l'eau, à l'occasion de quelques décollages inévitables en raison de la vitesse. Assiette parfaite, surtout compte tenu du poids présent à l'arrière, tenue de cap imperturbable, stabilité latérale idem, même avec un trim nettement positif à plus de 50 nœuds. De quoi envisager de longues traversées, alors que d'autres préfèreront regagner le port…
Au ponton :
La ligne du 10-mètres tranche avec celle des trois autres modèles qui sont encore assez proches de l'esthétique Nuova Jolly. L'Elegance 10 montre un autre visage, bien à lui, même si la forme de ses flotteurs n'est pas sans évoquer celle des Marlin Boat. Cette "teugue" qui anime le profil à la manière des bateaux de pêche sportive américains, lui confère une étrave bien défendue et une présence sur l'eau magistrale, que ne possèdent pas d'autres semi-rigides de cette longueur. A bord, on a vraiment l'impression d'être sur une grosse unité. Il est vrai que sa largeur, exceptionnelle, n'est pas pour rien dans cette sensation. Quelques équipements qui n'appartiennent qu'à lui le démarquent aussi de ses frères, à limage de la volumineuse console (hauteur : 1,82 m) qui abrite en standard un WC et propose deux banquettes latérales qui peuvent se convertir en une couchette double. Ajoutez la kitchenette extérieure (grand frigo, plaque de cuisson, évier), placée au dos du leaning-post, le chauffe-eau qui alimente la douche et l'évier, et vous étendez votre programme jusqu'à la petite croisière ! La discrète et esthétique delphinière, qui semble comme suspendue au-dessus du flotteur, ne sert ici qu'à l'amarrage. En effet, l'ancre est placée dans l'écubier d'étrave. Le guindeau électrique est évidemment livré de série sur cette unité qui déplace plus de 3,5 tonnes en charge.
Si les plates-formes arrière de l'Elegance 10 s'apparentent à celles des 8 et 9, elles disposent chacune d'une échelle et sont couvertes de teck à joints clairs. Un matériau élégant qui couvre l'intégralité du pont. La circulation y est particulièrement aisée, et l'accès à la plate-forme de bain facilité par l'absence de roll-bar (le cabriolet est rabattu dans une goulotte en périphérie du dossier de la banquette) et la présence de petites marches intermédiaires. Le rangement se fait sans encombre dans les généreuses cales avant et arrière, ou dans la console en cas de besoin. Il est simplement dommage que la table du carré (6 à 8 personnes) ne fasse pas office de rallonge du solarium arrière, cette dernière étant constituée par un autre élément lourd et encombrant.