Apparu il y a cinq ans, ce semi-rigide au style incisif est encore bien dans l'air du temps, alliant audace et élégance, ainsi qu'un comportement marin convaincant. Toutefois, son atout principal est une surface de pont XXL !
Texte et photos Philippe Leblond
Cherchez un semi-rigide de plus de 3 m de large pour moins de 7 m de long, vous n'en trouverez pas. Si, un seul : le Zodiac n-Zo (3,22 m pour 6,99 m !), mais conçu pour la croisière avec sa cabine. Ceci pour dire que le Carve 68 offre une surface de pont exceptionnelle, tout en échappant à la taxe touchant les semi-rigides de 7 m et plus. Revers de la médaille, le transport. Plutôt que de devoir systématiquement dégonfler les flotteurs pour le conformer au gabarit routier, mieux vaut posséder une place au port, ou à défaut un corps-mort…
Les saisons passent, mais le style du Carve 68 reste d'actualité. Il fut l'un des premiers à adopter le "edge-design" (style fait d'arrêtes vives, transposé du monde de l'auto)que, Avec ses accessoires gris métallisé et son classique roll-bar inox, notre bateau d'essai est toutefois moins démonstratif, que les premiers exemplaires avec leurs accessoires rouge vif et l'aileron type Formule 1. Mais revenons aux proportions du Carve pour souligner également son exceptionnelle longueur intérieure, la carène se prolongeant en chaise moteur, située pratiquement à l'extrémité des flotteurs ! De fait, le Callagari a peu de rivaux en termes d'espace habitable. Ainsi, on trouve deux solariums (celui de la poupe étant obtenu par le déploiement de la banquette arrière) encadrant un poste pilotage pour deux, autour duquel la circulation se fait facilement (les passavants, de vrais boulevards !), sur un pont revêtu de faux teck. Et la console possède, sur l'avant, un siège biplace qui, ajouté au leaning-post et à la banquette, porte le nombre de places assises à huit. Côté rangement, ce n'est pas mal non plus avec une grande soute avant, entièrement dédiée au rangement puisque le puits de mouillage est intégré à la petite delphinière qui coiffe le nez du bateau et intègre le guindeau électrique actionnant l'ancre sur son davier. Ajoutons le coffre de la console, volumineux lui aussi (ouverture frontale), le vide-poche côté pilote, le coffret du leaning-post et, bien sûr, la grande cale de la poupe avec sa pompe de cale. Dans celle-ci, on aurait bien aimé un plancher surélevé pour tenir les affaires au sec…
Il est temps, maintenant de quitter le port Tino Rossi (Ajaccio) pour évaluer ce Carve 68, qui bénéficie de la puissance maxi, en l'occurrence l'excellent Yamaha F250 (l'ancien V6 de 3,3 l). Bien installé derrière les commandes, j'apprécie l'agencement du tableau de bord, offrant une bonne lecture des instruments, et du GPS-sondeur intégré, ainsi que la bonne prise en main du volant. Un bémol toutefois, l'accélérateur placé trop en avant… Après un déjaugeage correct, mais pas fulgurant (4"3), marqué par un cabrage important, la montée en régime est énergique mais sans "claquer un temps" au passage des 20 nds (7"4 seulement). Quant à la vitesse de pointe, elle reste en deçà de la moyenne avec 42,6 nds. Des performances sans éclat donc (pour cette raison nous ne conseillons pas de descendre sous 200 ch), alors que les sensations à la barre sont bien présentes. Le Carve 68 répond bien au réglage de trim, un peu trop même puisqu'en régime de croisière, il convient d'ajuster l'angle de poussée pour éviter un léger marsouinage. La carène s'aère naturellement, sans beaucoup trimer, et se révèle vivante, réactive et agréable à barrer. Sûre, également, que ce soit par mer de face, de travers ou d'arrière (un bon mètre de houle résiduel), mais à condition de trimer un peu le bateau pour contrer une tendance à pencher sur bâbord lors des sauts. Le meilleur rendement s'établit à 3 500 tr/min (27 l/h), une allure de croisière économique qui tutoie les 20 nds et permet de garantir tout le confort nécessaire pour l'équipage, la carène du Carve amortissant efficacement les impacts. En virage, elle se montre maniable, aidée par une gîte intérieure prononcée, mais un léger mouvement de pompage de l'étrave en grande de courbe (toujours le nez léger), même avec le trim en négatif. En virage serré, rien à dire, le grip est constant et le bateau se relance facilement, la motricité n'étant pas prise en défaut.
AU PONTON
Elégant et sophistiqué, le Carve 68 ne peut masquer ses gènes transalpins… Son design semble moins avant-gardiste qu'il y a cinq lors de son lancement, mais il reste tout à fait actuel. Et le confort déployé à bord (deux solariums, nombreuses places assises, coffres volumineux) profite de son habitabilité hors pair pour un semi-rigide de moins de 7 mètres. Particulièrement large (3,05 m), il fait aussi apprécier la facilité de circulation sur son pont XXL revêtu de simili teck. Et puis, il y a ce gel-coat gris métallisé, un atout esthétique, bien dans l'esprit italien.
EN MER
Un peu décevant au plan de la vitesse maxi (son poids est il est vrai assez élevé) le Carve 68 se rattrape dans le domaine des sensations de pilotage, bien présentes et positives. Sa carène vivante, et efficace dans la vague, en fait un semi-rigide duquel on aime prendre la barre, mais qui demande quelques notions de réglages, de manière à optimiser son assiette et ses réactions. Voilà qui n'est pas pour nous déplaire… Notre conseil, concernant le choix du moteur, c'est de ne pas descendre sous 200 ch.