Le K7 Eros va-t-il faire école dans la sphère des semi-rigides de 25 pieds de type "familial", pourtant déjà riche de belles réalisations ? Difficile de répondre dans l'immédiat, mais avec ses audaces de conception, l'exigence qui a présidé à sa réalisation, et ses aptitudes nautiques, il met la barre très haut, et pourrait bien devenir la référence.
Texte et photos Philippe Leblond
Cela ne fait pas deux ans que ses deux premiers semi-rigides (K7 et K8) ont été présentés au Salon de Gênes, que le chantier milanais a déjà élargi sa gamme à huit modèles, de 5 à 12 mètres… Et le petit dernier, le 6.1, est sur le point d'arriver ! À la tête de Kardis, on retrouve les deux associés qui avaient créé la marque… Sacs. Andrea Cardinetti et Gabriella Schiavi poursuivent leur œuvre avec toujours autant de créativité, et le K7 que vous avez sous les yeux est la parfaite illustration. Il y a d'abord la ligne, bien équilibrée, servie par un graphisme dynamique, avec ce flotteur frappé d'un grand "K". Mais, c'est surtout par la conception de son poste de pilotage que le K7 surprend. Le pilote prend place sur un leaning-post doté d'amortisseurs. Encore plus original : la console possède un module supérieur indépendant et articulé, réglable électriquement en hauteur, afin d'ajuster au mieux la position de conduite. Et, cerise sur le gâteau, le pare-brise est réglable lui aussi ! Loin d'être des gadgets, ces trois innovations combinées permettent au pilote et au copilote de naviguer dans les meilleures conditions. Autre singularité (déjà vue chez SeaWater), un mini frigo encastré sur la face avant de la console…
Pour le reste, la conception rejoint ce qui se fait chez les concurrents. C'est le cas de la delphinière intégrant le dispositif de mouillage avec guindeau électrique. À noter que le roll-bar, qui supporte l'antenne VHF et les feux de navigation, est pourvu d'un éclairage de courtoisie à leds. Le pont avant est en grande partie occupé par trois coffres indépendants (pas de coffre long), dont les couvercles sont hélas dépourvus de vérins permettant de les maintenir ouverts, et de joints silencieux. L'embase au sol est à destination du complément de bain de soleil, lorsque celui-ci est utilisé comme table de pique-nique. Le petit frigo est alors à portée de main pour préparer les rafraîchissements…
Malgré sa largeur, la console laisse de larges passages latéraux, et la circulation aux abords de la banquette de poupe reste très commode. De la même manière, l'arceau rejeté vers l'arrière laisse un accès aisé vers la petite plate-forme de bain et son échelle, ainsi que la douchette, surtout lorsque le dossier de banquette articulé est en position bain de soleil. Cela dit, cette échelle non coffrée dépare quelque peu sur une unité de ce standing… Par contre, les signes du haut de gamme sont bien présents dans le traitement de la vaste cale arrière : compartiment entièrement revêtu de gel-coat brillant, coffrage des renforts de coque pour que les affaires de l'équipage soient maintenues au sec, coffrets latéraux pour dissimuler (et inspecter) le câblage de la direction et du moteur, double vérin à gaz pour faciliter le relevage de la banquette… De la belle ouvrage ! Au final, un aménagement de cockpit bien "balancé" qui n'évite pas quelques petites imperfections, au rang desquelles, une main courante au dos du leaning-post un peu basse, l'absence d'un cale-pied lorsqu'on pilote assis, le tableau de bord un peu étriqué (difficile de trouver la place pour un combiné GPS/sondeur), le manque de saisines, là où il est possible de s'asseoir sur le flotteur en navigation… Il convient néanmoins de féliciter Kardis pour le niveau d'équipement du K7 : guindeau électrique et douche de pont, entre autres, sont livrés en standard !
Il serait dommage, compte tenu des efforts et des prouesses consenties pour aménager le pont du K7 Eros, que son comportement dynamique ne soit pas à la hauteur. Une fois à sa barre, les doutes vont rapidement s'envoler. Le Kardis "fait le métier", et même bien mieux, comme il nous l'a montré lors de l'essai effectué chez Ferret Marine, distributeur de la marque pour l'ouest de la France, installé au Cap-Ferret…
Doté de l'excellent Yamaha F225 4-temps, le K7 n'a pas laissé entrevoir de faille dans son comportement. Rapide avec 42 nds en pointe, il signe un convaincant 7" pour accélérer de 0 à 20 nds, après un déjaugeage un peu lent (5"5), accompagné d'un léger cabrage. En outre, capable de planer dès 3 000 tr/min, il offre une plage de régime très large pour choisir sa vitesse de croisière. Un niveau de performance tout à fait satisfaisant puisqu’obtenu avec 75 ch de moins que la puissance maxi autorisée.
Sur le plan du comportement, le V6 nippon de 225 ch suffit à animer cette belle, mais lourde, carène (1 250 kg sans moteur) et donner du plaisir à son pilote. Le K7 est à la fois réactif, souple et facile à piloter, que ce soit à plein régime bien trimé (pas de roulis), ou en virage, à l'attaque, avec des prises d'angle franches et saines, un guidage de trajectoire précis et docile, sans qu'aucune ventilation (même en remettant les gaz braqué à fond) ne vienne perturber la motricité de l'hélice. Autre motif de satisfaction, ses qualités de franchissement, que ce soit de face ou d'arrière dans une houle résiduelle de plus d'un mètre autour du Banc d'Arguin. La carène du K7 fait preuve d'un bel équilibre et se réceptionne en ligne et en souplesse, défléchissant les embruns avec efficacité. Il n'y avait plus qu'à rentrer, bien secs, vers le port de La Vigne, en appréciant le confort à 4 000 tr/min, parfait rythme de balade pour cet ensemble, bateau/moteur, bien assorti. Notons toutefois la capacité restreinte du réservoir, avec une autonomie limitée, surtout dans l'optique d'un 300 ch.
CONCLUSION
Bilan très positif pour le fer de lance de cette jeune marque italienne qui, d'entrée de jeu, marque de son empreinte le marché du semi-rigide de luxe. Aux fondamentaux de sa catégorie (tenue de mer, agrément à la barre, capacité d'accueil, équipement complet), il ajoute d'ambitieuses innovations (leaning-post à amortisseurs, console et pare-brise réglables). Un seul regret, mais il ne pouvait guère en être autrement au vu du confort embarqué, son poids élevé qui oblige à choisir une motorisation haute…