Croisière en couple, ou sorties estivales entre amis, c'est le double programme que propose ce grand semi-rigide atypique, avec sa coque noire et son imposant gaillard d'avant. Ses points forts : confort cossu, agencement fonctionnel, nombreux détails pratiques et sécurité en navigation.
Texte et photos Jacques Anglès
Peu connu dans l'hexagone, Scanner compte parmi les plus anciens producteurs transalpins de semi-rigides hauts de gamme. La Motonautica Donato, née en 1986 près de Milan et rebaptisée Scanner en 1993, atteint aujourd'hui une maturité internationale. Son catalogue compte une trentaine de modèles de 3,20 à 11 m, répartis en trois gammes principales (Tender, Touring, Elegance), auxquels il faut ajouter les modèles personnalisés à la carte pour la plaisance (Custom) ou les professionnels (Professional). Le credo de la maison est de "satisfaire une clientèle à la recherche de nouveaux produits offrant les avantages et la sécurité des pneumatiques avec, en plus, le confort des bateaux classiques". Cela se traduit par un design cossu en termes de confort, associé à une esthétique originale, voire futuriste pour certains modèles, à l'instar des Envy et Dillenium.
Amiral de la flotte Scanner, le One 999 WA illustre la philosophie maison. C'est un habitable très typé, dont l'étrave verticale s'élève à plus de deux mètres au-dessus de l'eau en dévoilant largement la coque laquée noir. Si cet imposant gaillard d'avant qui évoque les lobsters-boats traditionnels n'emporte pas tous les suffrages, il a en revanche des atouts indéniables, à commencer par son vaste pont avant bordé de solides mains-courantes, formant un super solarium tout à fait sûr en navigation. Autre atout, ce pont surélevé abrite une grande cabine double offrant 1,85 m (!) de hauteur. Week-end à bord ou croisières d'été sont donc au programme, avec une autonomie qui dépasse largement les 200 milles. De plus, cette disposition ne réduisant en rien la surface de pont, le One 999 convient tout aussi bien aux sorties à la journée.
L'agencement du pont conjugue en effet une grande sécurité (cockpit profond, solides mains-courantes latérales), une circulation facile d'un bout à l'autre (passavants et marches d'accès au pont avant extra larges) et une capacité d'accueil généreuse. Jugez-en : huit convives (voire dix, en se serrant un peu) peuvent s'attabler confortablement dans le carré arrière, doté d'une grande banquette fixe en U et d'un double strapontin placé au dos du leaning-post. On apprécie au passage la belle surface de la table amovible et son rangement commode dans un logement dédié, sous le capot de soute arrière. Pour les moments de farniente, les bains de soleil avant et arrière totalisent sept à huit places, auxquelles s'ajoutent les espaces supplémentaires qu'offrent la grande plate-forme de bain en teck ou la cabine, parfaite pour une sieste à l'ombre. Côté vie à bord, il faut aussi mentionner la cuisine, installée sous l'assise de pilotage, dont l'équipement est toutefois en option (réchaud deux feux, grand évier et réfrigérateur). Enfin, la cabine logée sous le pont se révèle particulièrement spacieuse, avec une grande entrée haute de 1,85 m, un lit de proue "king-size" et de nombreux rangements. Dommage que la salle d'eau fermée avec WC soit en option, le sanitaire installé en standard dans l'entrée de la cabine n'étant pas en accord avec le luxe de cette unité. Car en ce qui concerne la construction et les accessoires (accastillage, sellerie, garnitures de teck massif, etc.), tout est de belle facture, avec une finition soignée. Les détails pratiques ne sont pas oubliés, à l'exemple de la “table à cartes“ avec capot transparent placée sur la console, de l'installation du guindeau ou du bimini repliable sur l'arceau Quelques bémols sont tout de même à signaler, par exemple la banquette de pilotage un peu étroite pour deux (alors que la place ne manque pas pour gagner 10 à 15 cm centimètres qui changeraient tout), les dossiers de banquette trop bas ou l'absence de cale-pied pour le pilote. Tous comptes faits, le bilan reste largement positif et peut se résumer ainsi : un agencement bien organisé, une bonne ergonomie de chaque zone et une circulation particulièrement facile (passavants et marches d'accès au pont avant extra larges).
Un bateau à l'aménagement aussi poussé affiche évidemment un poids au-dessus de la moyenne et exige donc une motorisation puissante. Le chantier propose plusieurs montes (2 x 300 à 2 x 380 ch Mercruiser essence ou 2 x 300 à 2 x 330 ch Volvo diesel), le modèle de notre essai étant pour sa part doté de deux Mercruiser de 320 ch, qui vont se révéler parfaitement adaptés.
Sans attendre, voyons donc ce qu'il donne sur l'eau, avec un vent modéré et une petite houle résiduelle de sud-est au large de Saint-Tropez. Contact ! Les V8 démarrent en toute discrétion (bon point pour l'insonorisation de la cale moteur) et procurent une excellente manœuvrabilité au ralenti. Sitôt sorti de la zone des 300 m, je pousse les manettes de gaz. Le temps de déjaugeage trahit le poids de la coque, d'autant plus que les hélices installées ne semblent pas idéales. Après cette première impression en demi-teinte, tout s'arrange dès que le bateau est lancé. Assiette pratiquement horizontale et étrave dégagée jusqu'à mi-longueur, le One 999 se révèle agréable et facile à piloter, en délivrant de bonnes vitesses de croisière aux meilleurs régimes des moteurs (22 à 27 noeuds à 3 000-3 500 tr/min). La stabilité est impeccable en longitudinal comme en latéral et, pour les passagers, le confort est optimal, avec un bon amortissement de la carène et un bruit faible qui confirme la qualité d'insonorisation déjà notée au ralenti. A l'aise dans la houle, qu'il franchit en douceur, le One 999 se révèle ludique quand on pousse les gaz à fond et ne rechigne pas à décoller au sommet des vagues, bien que sa vitesse de pointe reste inférieure à 40 nœuds. Plus surprenant compte tenu de son poids, il montre une belle agilité en virages, bien servi par une direction douce. L'accroche semble imperturbable et l'on ne décèle aucune ventilation en resserrant le rayon, mais l'effet conjugué du poids et la puissance consommée par le virage se traduisent par un fort ralentissement. Une chose est sûre, cette carène a plus de tempérament que sa silhouette ne laisse deviner, et une puissance supérieure procurerait un pilotage plus nerveux sans compromettre la sécurité. Mais n'oublions pas que sa vocation est plutôt la balade que le pilotage sportif !
CONCLUSION
Sous une esthétique qui ne fera jamais l'unanimité, ce grand semi-rigide, tel Janus, présente deux visages indissociables : croiseur de luxe capable de couvrir des traversées hauturières en sécurité, et super day-boat dont le pont très spacieux peut accueillir confortablement six à dix personnes en sortie à la journée. Doté de Mercruiser de 320 ch, il délivre un pilotage facile, sûr et assez ludique malgré son poids. Pour la croisière en famille, la version hors-bord proposée en option libère l'immense soute arrière au profit d'une seconde cabine.