A l'écart de la circulation "volcanique" qui agite la ville une bonne partie de la journée, la fille du Vésuve sait aussi accorder quelques pauses au visiteur. C'est le cas sur sa promenade de bord de mer, où l'ambiance lénifiante des petites marinas vous prépare à celle, comme hors du temps, des îles qui lui font face : Procida, Ischia et Capri.
Texte et photos Philippe Leblond
Venus à Naples pour essayer le nouveau le vaisseau-amiral de la gamme semi-rigide Honda, le 4XC H9, nous débarquons de l'avion en compagnie du staff Honda France pour rejoindre sans tarder l'hôtel de bord de mer où nous allons passer la nuit. Depuis notre dernier passage, le trafic automobile ne s'est pas arrangé… Enfreindre les lois du code de la route apparaît comme le moindre des soucis de l'automobiliste napolitain. Ce tourbillon anarchique se fait plus discret alors que nous arrivons sur la via Francesco Caraciolo, le cours qui longe la mer et les marinas. Le grand port de commerce est situé plus à l'est, après le petit isthme sur lequel se dresse le Castell dell'Ovo (Château de l'Oeuf), forteresse dont la construction s'est étalée sur huit siècles (du VIIème au XVème !) et ouverte à la visite. Du haut de ses remparts, on jouit d'une belle vue sur le bord de mer. Ce château fort domine un petit port qui mêle bateaux de pêche et de plaisance. Ceux-ci sont amarrés à des quais et pontons vétustes, au pied des restaurants et du prestigieux Real Yacht Club Canottieri Savoia. Fondé en 1893, il a collectionné un nombre invraisemblable de trophées dans les plus grandes compétitions d'aviron et de voile, notamment lors des Jeux Olympiques. Si vous avez l'occasion de pénétrer dans son club-house, n'hésitez pas… Ce lieu chargé d'histoire possède un charme suranné et émouvant.
C'est dans le port de plaisance principal de la cité amalfitaine, la Marina Molo Luise, que nous attend le H9, sur le tableau arrière duquel trône fièrement une paire de Honda BF250. Un demi millier de chevaux pour accomplir notre boucle expresse en passant par Procida, Ischia et Capri, ça aide à raccourcir les distances ! Les pontons sont occupés par des unités de toutes dimensions, du petit dinghy sportif au grand yacht moderne en passant par le paisible trawler. Sur le quai de la jetée, des pêcheurs ravaudent tranquillement leurs filets. L'ambiance paisible tranche avec l'agitation de la ville. L'heure est venue de tourner le dos à Naples, ses immeubles baroques et colorés, son urbanisme si dense. Nous mettons sans plus tarder le cap vers le large, en direction de Procida. Sur bâbord, la petite péninsule du Castel dell'Ovo se fond un instant dans l'ombre monumentale du Vésuve, un géant au sommeil inquiétant (dernière éruption en 1944). A l'ouest du port, notre regard est capté par une belle bâtisse blanche du bord de mer. Notre skipper du jour, le responsable commercial de Honda Italie, précise qu'il s'agit de la Villa Rosebery, résidence de vacances du président de la république italienne, Giogio Napolitano (le bien nommé !).
Quelques milles plus loin, nous laissons à tribord la pointe nord du golfe de Naples, la Porta Paone. Il est interdit de pénétrer dans cet abri parfaitement circulaire, car il s'agit d'un domaine pénitentiaire. L'extrémité du cap, ponctuée par le Mont Procida est constellée de petites habitations, celles du village de Bacoli. Trois milles plus loin, l'Ile de Procida se dévoile à nous sous son angle le plus spectaculaire. Au détour d'un haut éperon rocheux, sur lequel un château fort joue les équilibristes, nous apparaît Corricella, où furent tournées quelques scènes du film "Il Postino", avec Philippe Noiret. Vision étonnante que celle offerte par ce village où toute notion d'urbanisme semble avoir été bannie… Vu de son petit port de pêche, c'est un empilement anarchique de maisons multicolores, ou l'on peine à distinguer la moindre ruelle, tant elles sont blotties les unes contre les autres. Les juxtapositions de couleurs feraient pâlir des coloristes comme Dufy ou Miro, s'ils étaient encore de ce monde. Tandis que notre imposant semi-rigide touche le quai, quelque chose d'insolite retient notre attention. Le silence absolu du lieu contraste étrangement avec la densité de l'habitat. Pas un cri, pas un mot, pas un bruit ne vient troubler la quiétude du village, au point qu'on n'entend plus que le discret ralenti de nos V6 japonais. Non loin, des pêcheurs démêlent leurs filets à bord d'un gozzo, pointu typique du Golfe de Naples. Sans même se parler. Quelques photos et nous quittons les lieux discrètement, pour ne pas déranger davantage…
En mettant le cap sur Ischia, toute proche (environ 4 milles), nous laissons sur tribord Vivara. Cette minuscule île, reliée à Procida par une simple route et vierge de toute construction, est en fait une réserve naturelle. Ischia, la plus grande des îles faisant face à la Baie de Naples impose d'emblée un solide relief. La première vision qu'on a de ce lieu est un château, le Castello Aragonese. Une forteresse austère, nichée sur un piton rocheux dont la base est percluse de petites grottes. Malgré sa configuration de mouillage privilégié, cette anse reste ouverte au vent dominant (sud-ouest). Un passage nuageux rend un peu quelconque ce lieu qui vaut paraît-il le détour. Le temps nous pressant, nous décidons de ne pas faire le tour de l'île, et donc de faire l'impasse sur les sites de charme que sont le quartier de Ponte (est de l'île), ou le petit port de Sant' Angelo (sud de l'île) avec son joli village blanc, à flanc de colline.
De retour vers Naples, nous décidons de repasser par Procida. Nous pénétrons dans l'une trois marinas que propose cette petite île, non dépourvue d'abris pour les plaisanciers. Bien différente du petit port traditionnel de Corricella, la Marina di Procida est un vaste bassin, situé au nord-est de l'île, mais dotée cette fois des infrastructures que réclame la plaisance d'aujourd'hui : poste de carburant, pontons avec eau potable et électricité, places de stationnement pour les voitures… Cela ne l'empêche pas de posséder un certain cachet puisqu'on y retrouve, comme à Corricella, des maisons multicolores avec leur toit terrasse et une petite église baroque, ocre jaune. Bateaux de plaisance et petits pointus de pêche s'y côtoient en bonne intelligence. Une façade blanche, barrée de la mention "Istituto Nautico", capte le regard. C'est le centre de formation des commandants des navires de commerce, depuis 1875.
A l'opposé de l'île, côté ouest, se trouve la Marina Grande, le port historique de Procida qui en est encore le centre social et économique. On y trouve surtout une flotte de pêche, avec laquelle il est possible d'acheter du poisson frais directement au bateau. Mais c'est aussi ici qu'arrivent les ferries en provenance de Naples et d'Ischia.
Le lendemain matin, après avoir refait le plein d'essence au port de Naples (Marine Molo Luise), nous pointons l'étrave du H9 vers un gros rocher qui nous semble finalement assez proche : Capri. En fait, le relief est tel qu'il paraît nettement plus proche qu'il n'est. Venant de Naples, on a vraiment l'impression d'un simple piton rocheux. En approchant, les contours de l'île se précisent, spectaculaires. Si Capri est moins étendue qu'Ischia, elle est plus verticale encore. Il nous a fallu une demi-heure à près de 30 nœuds pour arriver au pied de sa côte vertigineuse, où domine le Mont Solaro, à près de 600 mètres.
Nous décidons de commencer par un tour de l'île dans le sens des aiguilles d'une montre, après être passés dans la Marina Grande (côte nord), pour réserver une place à quai, le temps de déjeuner et de se balader dans le village. Naviguer autour de Capri implique de lever les yeux, constamment. Il serait dommage de manquer les jolies villas, perchées pour certaines à plusieurs centaines de mètres au-dessus du niveau de la mer, profitant d'une vue panoramique et définitivement imprenable sur la Grande Bleue. Il en est une que je guette plus particulièrement : la Villa de Malaparte. Soudain elle apparaît, allongée de tout son long sur un éperon rocheux, à 30 mètres au-dessus des flots. La maison de l'écrivain italien, à l'architecture avant-gardiste (elle date de 1937 !) est aussi célèbre pour avoir servi de décor dans le film de Godart, "Le Mépris" (1963). Comment ne pas se souvenir de Bardot et Piccoli arpentant nonchalamment le long toit-solarium, couleur latérite ? Un escalier de 99 marches, taillé dans la roche, permet d'accéder à la baignade. Idéalement située, elle bénéficie d'un point de vue privilégié sur les Faraglioni, trois pitons rocheux d'une centaine de mètres de haut. Des rochers qui ne sont pas sans évoquer ceux d'Etretat ou de la Baie d'Halong (avec un brin d'imagination). Celui du milieu est percé d'une arche monumentale, et nous ne résistons pas à l'envie de la traverser. Notre H9 y passe haut la main.
Notre périple se poursuit à allure réduite. Les deux gros Honda font apprécier leur discrétion. La muraille rocheuse défile, et nous nous rendons à l'évidence : Capri est avare de plages. Un avantage à cela, la côte est acore, et l'on ne risque pas d'y laisser une hélice… Notre tour de l'île s'achève alors que nous repassons devant la jetée de la Marina Grande, les yeux encore pleins de ces points de vue spectaculaires, qui doivent l'être plus encore à la faveur d'une balade en scooter de location, sur les routes de corniche. Une fois amarré, nous passons devant des barques de pêche sur cales. Leur ligne est particulièrement élégante, et certaines reçoivent un petit coup de pinceau de la part de leur propriétaire. Le funiculaire étant immobilisé par les services de maintenance, nous grimpons dans l'un des minibus orange qui mènent en haut du village (à pied, c'est une vraie expédition !), Les chauffeurs font preuve d'une étonnante virtuosité pour négocier les virages en épingle à cheveux et se croiser en rasant les façades des maisons. Terminus ! Nous partons en quête d'un restaurant. De montées en descentes, la promenade offre des points de vue multiples, où se succèdent placettes, ruelles, terrasses, conservant un cachet authentique, parfois kitch, malgré la présence des inévitables enseignes de luxe. Nous trouverons notre bonheur avec l'Isidoro, où nous seront servies de savoureuses spécialités napolitaines. Mais, notre temps est compté, et il faut déjà reprendre le chemin de la Marina Grande. Nous passons devant le Grand Hôtel Quisisana, vu dans le film La Dolce Vita, puis la "boîte" référence des nuits capreses : la Taverna Anema.
De retour au port, on aperçoit quelques touristes formant une file d'attente devant le guichet afin d'obtenir leur billet pour partir, en bateau, visiter la fameuse Grotta Azzura (12,50 € sans le pourboire, pour 5 minutes à l'intérieur !). Hors saison, et hors week-end, c'est agréable, on ne se marche pas sur les pieds… Si l'on peut se permettre un conseil : n'allez pas visiter Capri en été. Les paquebots de croisière qui déversent leurs flots de touristes éphémères (parfois deux heures maxi sur place !) rendent la visite de l'île quasi insupportable. Il suffit de contempler la verticalité du relief, l'étroitesse des rues, et les moyens d'accès à la "ville haute" (minibus ou funiculaire) pour imaginer la bousculade !
GUIDE PRATIQUE
Cartes marines
Imray n° M46 (des îles Pontines à la Baie de Naples), WGS84.
Accueil dans les ports
VHF : canal 9 Naples, canal 6 Procida, canal 71 Capri.
Carburant
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Naples : Marina Molo Luise
(Capitainerie : VHF canal 9 – Tél. 00 39 081 96 333 96)
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Procida : Marina di Procida
(Capitainerie : VHF canal 6 – Tél. 00 39 081 869 9668) ouvert de 8h00 à 19h00.
Distances en mer
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Naples/Procida : 12 milles
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Procida/Ischia : 5 milles
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Ischia/Capri : 16 milles
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Capri/Sorrente : 8 milles
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Capri/Naples : 18 milles
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Naples/Sorrente 12 milles
Distance par la route
De la frontière française à Naples : 850 km
(autoroute sur toute la distance).
Bonnes adresses
Restaurant Isidoro (Capri) : campée sur la rue principale, en haut du village, la façade discrète se signale néanmoins par une carte géographique de l'île en faïence, et des petites lanternes éclairées même en plein jour. Les pizzas y sont délicieuses, mais la carte va bien au-delà de ce met populaire, avec une cuisine plus élaborée, dont une dizaine de spécialités napolitaines. Trois autres bonnes nouvelles : les prix sont raisonnables (le plat principal oscille entre 11 et 30 €), le service est soigné et l'accueil chaleureux. Tél. : 0039 081 837 7252. E.mail :
isidoro@capri.it
Restaurant La Fontelina (Capri) : à l'opposé de l'Isidoro, ce restaurant de bord de mer est situé au ras des flots et déploie une grande terrasse avec matelas et parasol (20 €), pour prendre un bain avant de déjeuner, ou se relaxer après. Vous pourrez y déguster une cuisine italienne savoureuse à dominante des produits de la mer (huîtres, poissons grillés, fritures…), avec une vue privilégiée sur les rochers Faraglioni. Il est possible d'y accéder par la mer (petit débarcadère), puis de mouiller son bateau en face. Sinon, un service de navette part de la Marina Piccola pour 5 €. Ouvert d'avril à octobre, de 12h30 à 16h30 (plage terrasse de 9h00 à 19h00). Réservation par téléphone : 00 39 081 837 0845.
Hôtel La Tonnara (Procida) : ce 4 étoiles, situé sur la Marina Chiaiolella et à portée de fusil de la plage, propose 14 chambres (dont certaines avec terrasse) avec vue panoramique sur la mer et l'îlot de Vivara. Air conditionné. Tarif : 90 € la nuit.
Hôtel Royal Continental (Naples) : bel établissement très bien situé, face à la marina ancienne (club nautique) et au Castel dell'Uovo. Confortable lounge-bar avec amples fauteuils en cuir et larges baies vitrées donnant sur le château fort. Restaurant largement ouvert sur la baie. Tarif : à partir de 138 € la nuit.
A ne pas manquer…
Villa Jovis (Capri) : ce n'est plus une villa, mais un site archéologique. Il n'en reste pas moins que les vestiges de cette résidence de l'Empereur Tibère (1er siècle après JC) laisse imaginer son incroyable faste (7 000 m2 couverts, entourés de 13 000 m2 de jardins). Quand il s'agissait de prestige, les Romains ne jouaient pas "petit bras " ! De surcroît, sa situation exceptionnelle (elle est perchée à plus de 300 mètres au-dessus du niveau de la mer à environ une heure du centre de Capri) offre une vue panoramique unique sur l'île et le Golfe de Naples. Prix de la visite : 2 € (gratuit pour les moins de 18 ans). Fermée du 1er au 5 janvier et le 25 décembre.
Remerciements
Toute notre gratitude aux personnes qui ont participé à la réalisation de ce reportage et, plus particulièrement, à Vincenzo Paduano, directeur commercial Honda Italie, et à M. Marinelli, du Centro Nautico Marinelli S.r.l., concessionnaire Honda à Naples. Leur connaissance des lieux et leur disponibilité ont été appréciées.